“East of the Sun”, poésie de l’intime

Lors d'un second voyage au Japon, le photographe Giovanni Maggiora a capturé des atmosphères évoquant les romans de l'auteur Haruki Murakami.

04.07.2022

TexteClémence Leleu

© Giovanni Maggiora

East of the Sun est une série du photographe turinois Giovanni Maggiora, et son histoire se joue en deux temps. En 2017, le photographe, alors spécialisé dans la photo de rue, s’envole pour la première fois au Japon. Il plonge alors dans un pays qu’il a fantasmé à travers « des milliers d’images, de récits, et je suppose d’idées reçues », explique-t-il à Pen. « Tout est là, dans la bucket list de tout guide de voyage à suivre et épuiser avant de repartir, mais on s’aperçoit vite que ce n’est qu’une première couche, vraie et en même temps si partielle. » 

Durant ce séjour, il multiplie les clichés, surtout urbains, mais une fois de retour en France, Giovanni Maggiora s’embarque dans un autre voyage vers le Japon, à travers l’art cette fois. Littérature, photographie, il découvre par leur intermédiaire les contours d’un archipel moins stéréotypé. Et c’est particulièrement par l’intermédiaire de l’écrivain Haruki Murakami qu’il aiguise son œil. « Je ne vais pas dire que j’ai cherché pendant mon voyage à délibérément trouver des références à ses romans, mais ses atmosphères ont sûrement informé mon regard et ressenti. Même si je ne les cherchais pas, vous trouverez dans East of the Sun un pilier d’autoroute urbaine à Tokyo, essentiel à l’histoire de 1Q84, et une plage de galets qui peut évoquer Kafka sur le rivage », détaille-t-il.

 

Se confronter à soi-même

Dans East of the sun — un clin d’oeil à l’oeuvre Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil du même Murakami —, sont compilés les clichés de son second séjour japonais. Il y explore villages et zones pavillonnaires, se perd dans les rues de son quartier, expérimente le quotidien. On y découvre des paysages enneigés, des visages saisis sur le vif, des ruelles vides. « Je prends une voie détournée pour montrer non seulement ce que j’ai vu, mais aussi et surtout ce que j’ai ressenti. Les petites miettes qui m’ont montré le chemin parmi les ruelles et routes du quotidien, qui m’ont peut-être confronté à une version de moi-même que le Japon a fait ressortir », confie Giovanni Maggiora. « Je dis souvent que tout travail photographique n’est qu’un exercice d’auto-portraiture : là, avec East of the Sun, j’ai peut-être révélé plus de moi que jamais. »

Une série composée intégralement de clichés en noir et blanc, une technique photographique que l’artiste a par la suite délaissée « J’ai longtemps adhéré à cette lecture quelque part minimaliste du monde, réduit dans son essence de forme et de lumière, sans ce que je pensais être le chaos de la couleur. Après la publication de East of the Sun, j’ai ressenti le besoin de sortir de mes réflexes habituels et j’ai décidé de relever le défi de la couleur, infiniment plus complexe à maîtriser car les variables dans le cadre se démultiplient quasi exponentiellement », conclut Giovanni Maggiora. C’est donc en Corée du Sud qu’il a notamment expérimenté la photographie en couleur, avec sa série Three Kingdoms.

 

East of the Sun (2018), une série de photographies par Giovanni Maggiora auto-publiée sur son site internet.

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora

© Giovanni Maggiora