Issei Suda se pose en observateur extérieur de son quotidien dans “Family Diary”
Pendant deux ans, il a photographié sa famille avec un Minox, un minuscule appareil photo utilisé notamment par les services de renseignement.

© Issei Suda
« Il ne s’agissait que de petits moments insignifiants de notre agenda quotidien, mais le regard que je jetais ainsi sur une intimité familiale dont j’étais l’un des acteurs faisait en même temps de moi un observateur extérieur. » Voilà comment le photographe Issei Suda résume en quelques mots le travail qu’il a effectué entre 1991 et 1992 et regroupé dans l’ouvrage Family Diary. Pendant ces deux années, il capture son quotidien, qui s’articule principalement autour de sa femme, sa fille et leur chien.
Issei Suda nait en 1940 à Tokyo et se forme au Tokyo College of Photography, dont il est diplômé en 1962. Après avoir été photographe de plateau, il se lance en tant qu’indépendant à compter de 1971. Photographe de l’urbain et du quotidien, il signe plusieurs séries remarquées comme His & Her et Passing Summer, et fait du noir et blanc sa technique de prédilection. Il meurt en 2019.
Expédier le temps dans le passé
Si Family Diary est un recueil d’instants du quotidien, ce n’était pas initialement l’objectif du photographe qui souhaitait davantage se lancer dans une série de paysages urbains, principalement tokyoïtes ou taïwanais. « Mais je me suis vite rendu compte que mon objectif s’infiltrait jusque dans mes lieux de vie et qu’à travers la lentille de mon Minox, c’était en fait ma vie de famille que ma cornée observait », explique-t-il en épilogue de son ouvrage.
On découvre alors dans Family Diary un quotidien fait de moments de fêtes, de crises de larmes, de partage d’un repas ou de balade dans la nature, où les portraits de sa femme et de sa fille sont complétés par quelques autoportraits. De la ville, il n’y a presqu’aucune trace, sa famille occupant toujours le premier plan, reléguant le décor à l’arrière-plan. Des clichés pris avec un Minox, un des appareils photos les plus petits du marché, créé en 1937 et utilisé principalement par les services de renseignements durant la Seconde Guerre mondiale et la guerre froide. En ressort une série en noir et blanc, au grain rugueux qui, selon Issei Suda, « semble expédier ce temps au fond de l’abîme du passé. »
Family Diary (2021), un ouvrage de photographies par Issei Suda, publié par Chose Commune.

© Issei Suda

© Issei Suda

© Issei Suda

© Issei Suda

© Issei Suda

© Issei Suda
LES PLUS POPULAIRES
-
“Shojo Tsubaki”, une monstrueuse parade
Le chef d'œuvre d'horreur du maître du manga underground Suehiro Maruo célèbre la fascination historique pour le genre érotico-grotesque.
-
Recette d'umeboshi par Karen Solomon
A la différence des prunes d'Occident, l'ume ne se consomme pas crue et est saumurée par les Japonais qui raffolent de ce condiment acidulé.
-
À l’époque Edo, les criminels étaient tatoués
Les tatouages traditionnels avaient une signification très forte, les meurtriers étaient tatoués sur le visage, les voleurs sur le bras.
-
La métamorphose du sakazuki
Les sakazuki sont les coupelles dans lesquelles est servi le nihonshu. Ryota Aoki, un jeune céramiste, brise les conventions qui entourent leur fabrication.
-
The Analog Club, lieu de ralliement de la communauté argentique à Paris
Ce concept de boutique-galerie-labo propose de revenir à une pratique de la photographie plus consciente, fondée sur le format papier.