Mayumi Hosokura, les couleurs du plaisir
Ode à la volupté et à la photographie, la série “Jubilee” montre un quotidien en fête, aux éclats plus vibrants que le réel.
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
L’amour de la photographie peut prendre plusieurs teintes. Pourquoi se cantonner aux couleurs naturelles quand le développement ouvre une palette plus riche encore, plus tranchée, bien que factice ? Des pigments qui expriment à eux seuls des émotions, et sont vecteurs de sentiments.
C’est le parti pris de Mayumi Hosokura, née en 1979 à Kyoto et diplômée en photographie à la faculté d’Arts de l’université Nihon en 2005, après des études en littérature. Allant piocher dans les clichés de nus de sa première série KAZAN, elle décide d’aller plus loin dans son processus créatif en réalisant Jubilee de 2012 à 2017. Une série qui injecte plus de joie et de fantaisie dans ses images, comme une célébration du plaisir.
Plaisir de voir
Rose, jaune, vert. Les couleurs nous font tinter la cornée, une explosion visuelle qui devient sonore par le rythme chromatique qui est donné. La dynamique s’accentue par la répétition. Une même photo peut changer de carnation, proposer un sens antagoniste ou complémentaire et composer toute une partition par l’enchaînement ou les associations qui sont faites. Les corps sont dénudés, les sexes apparents. On jouit d’une liberté joyeuse. Ni voyeuriste, ni ostentatoire, ni vulgaire, l’humain est exposé dans une forme d’innocence, calme et délectable. Les sujets participent à l’engouement, et au-delà des nuances bariolées, néons et boules à facettes nous invitent à la fête. Des fragments de corps et d’objets captés avec la même ardeur que le sont les minéraux et les plantes. Fonctionnant sous forme de métaphores, ces parallèles font des éléments un tout homogène.
« Le plaisir est une émotion vraiment importante pour moi. Plaisir de voir, de toucher, de vivre… », nous dit l’artiste. Le jubilé comprend plusieurs origines, politiques, religieuses, royalistes… Chez les Anglo-saxons il peut même se parer d’argent, d’or ou de diamant (Diamond Jubilee). Il a ce caractère scintillant et festif par essence. Si on le conjugue, il devient tout de suite synonyme de satisfaction extrême, intérieure et savoureuse. Au Japon, le terme jubilé (shukusai 祝祭) signifie aussi festival. Il est toujours question de célébration et l’exception reste le dénominateur commun. La série de Mayumi Hosokura fonctionne de cette manière, mettant de l’extraordinaire et du plaisir dans le quotidien. Une euphorie propre à l’évasion et au jamais vu. « Ces images sont plus attrayantes que la réalité. Pour moi, la photographie est remplie de la joie de toujours voir ».
Un négatif, plusieurs tirages
Si les couleurs sont ici synonymes de gaité, c’est aussi une proclamation de l’artiste, comme une déclaration d’amour à la photographie. « J’utilise 6 couleurs R/G/B/C/M/Y. Ce sont celles utilisées dans le papier photographique couleur en chambre noire. Je représente donc l’activité photographique en utilisant ces 6 couleurs essentielles ». En travaillant le médium via ces particularités techniques, allant chercher dans ses retranchements, Mayumi Hosokura lui démontre son affection. « Je me suis demandé pourquoi nous devions choisir une seule image. Quand j’étais dans la chambre noire, je faisais plusieurs tirages d’essai pour faire de bonnes images. Mais quand j’ai vu de nombreux tirages d’essai réalisés à partir d’une seule image de négatif, j’ai pensé que ces variations étaient toutes différentes ». Il n’y a plus de limites à satisfaire, plus de choix à faire. La captation va au-delà des représentations du réel, et l’artiste révèle celui, voire ceux, qu’elle préfère.
Cette liberté de ton qu’elle s’accorde est aussi celle qu’elle laisse ou réclame aux spectateurs. En photographiant de façon morcelée, elle isole, met en valeur et place les éléments qui composent ses clichés sur un pied d’égalité. « Je veux en faire des fragments et je veux que les spectateurs reconstruisent des images dans leur tête ». Textures, matières, surfaces et formes s’alternent, se juxtaposent, parfois, se confondent ou s’allient par les couleurs. « Je veux réorganiser les frontières qui étaient ou sont considérées comme naturelles entre l’organisme et le minéral, l’homme et l’animal, l’homme et la machine, également les nationalités et les races, en fonction de la sexualité et du sexe ». Abaisser les barrières, à commencer par celles des corps en les préférant nus, égaux. Mayumi Hosokura après s’être souciée du plaisir, poursuit sa quête photosensible autour de l’amour, prenant cette fois-ci les étoiles comme interlocuteurs dans sa série Crystal Love Starlight.
Jubilee (2012-2017), une série de Mayumi Hosokura à retrouver sur son site internet.
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
Mayumi Hosokura, “Jubilee”, 2012-2017 ©︎ Mayumi Hosokura
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