Tsutomu Yamagata et la surveillance consentie
Le photographe a installé des caméras infrarouges dans la chambre de jeunes femmes qui offrent ainsi à voir leur quotidien, banal.
Surveillance (2018) © Tsutomu Yamagata
C’est un projet singulier, qui pourrait à première vue mettre mal à l’aise. Pour la série Surveillance (2018), présentée par la Zen Foto Gallery, le photographe japonais Tsutomu Yamagata a proposé à des femmes d’installer des caméras infrarouges — habituellement destinées à la surveillance des animaux —, dans leurs chambres.
Après avoir lancé un appel à candidatures en ligne, le photographe né en 1966 à Tokyo a examiné les portraits et informations personnelles reçus, avant de leur remettre la caméra. Il n’est ensuite plus intervenu, jusqu’à ce qu’il récupère les clichés capturés.
Ce qui se cache derrière ces vies
Les jeunes femmes impliquées dans le projet sont issues de différents milieux : employées, enseignantes, étudiantes en école d’art… Les images ont été réalisées — sans son ni lumière — lorsque la personne se déplace dans la chambre. Celle-ci prête parfois attention à la présence de l’objectif, elle l’oublie à d’autres moments. Comme l’explique l’artiste dans le texte associé à l’ouvrage publié par la galerie, l’idée était que « la caméra continue de filmer même lorsqu’elles seraient lassées d’être photographiées. Lorsqu’elles m’ont rendu la caméra, elles semblaient plus curieuses des résultats que moi, comme si elles jetaient un coup d’œil à la vie d’autres personnes. »
« Pour je ne sais quelle raison, je trouvais beaucoup d’entre elles assez froides, téméraires. Pour ce projet, j’ai regardé dans leurs vies afin de découvrir ce qui se cache derrière ce charme et ce mystère », poursuit l’artiste. Les photographies présentées, en noir et blanc pour la majorité, mais également dans des tons rouges (propre à la lumière infrarouge) montrent ces femmes seules, souvent nues, ou en train de s’habiller, vacants à leurs occupations, allongées, ou face à l’objectif.
Avant cette série, la publication en 2015 de Ten Disciples avait permis à l’artiste de remporter le premier Emaho Foundation’s Emerging Asian Photography Grant. Pour ce travail, Tsutomu Yamagata s’était rendu dans les thermes de Tamagawa dans la préfecture d’Akita, réputés pour leurs propriétés médicinales, et fréquentés par des patients atteints de cancers.
Surveillance (2018), un ouvrage de Tsutomu Yamagata publié par la Zen Foto Gallery.
Surveillance (2018) © Tsutomu Yamagata
Surveillance (2018) © Tsutomu Yamagata
Surveillance (2018) © Tsutomu Yamagata
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