Christine Bjerke explore le monde des FX Beauties, femmes au foyer du futur

L'architecte a créé une plateforme numérique pour étudier les femmes japonaises sans activité investissant en bourse.

18.08.2020

TexteClémence Leleu

© Market Watch

(On the Floating World of) the FX Beauties est un projet de l’architecte Christine Bjerke qui s’intéresse au phénomène des FX Beauties, ces femmes au foyer japonaises qui investissent en ligne leur argent et bousculent les codes du rôle des femmes dans la société nippone. « Une grande partie des membres ont commencé à échanger des devises numériques sur le marché Forex (un marché d’échange de devises, ndlr) entre des tâches domestiques telles que la garde d’enfants ou encore l’entretien ménager. Elles représentent le dilemme auquel sont confrontées beaucoup de femmes : choisir leur famille ou leur carrière », explique l’architecte. C’est durant son master à l’University College de Londres qu’elle commence à étudier le sujet, après avoir lu un article du New York Times sur ces FX Beauties. 

Christine Bjerke s’intéresse notamment à l’impact de cette activité sur l’organisation et les logiques spatiales de l’espace domestique. « Que se passe-t-il lorsque la maison devient également un lieu où sont générés des profits ? Que signifie habiter simultanément l’espace physique de la maison et l’espace virtuel mondial des économies financières ? »

 

Une plateforme aux contributeurs divers

Pour répondre à ces questions, elle crée la plateforme (On the Floating World of) the FX Beauties où elle invite également chercheurs, auteurs ou architectes à publier leurs réflexions sur l’impact sociétal, culturel, financier ou encore spatial de ce mouvement. « Je choisis des contributeurs pour créer une plateforme interdisciplinaire, qui questionne la complexité de ce sujet à divers niveaux. Chaque contributeur présente des recherches, des réflexions et des idées que je trouve importantes », explique Christine Bjerke.

À l’instar de l’architecte britannique Jack Self qui y publie Housewifization, un essai où il fait valoir que les intérieurs compacts et minimalistes japonais sont spécialement conçus pour une femme au foyer à temps plein, dont le rôle est principalement de soutenir son mari. L’espace domestique japonais se déploie uniquement autour de quelques fonctions de base : manger, dormir et se baigner. Une organisation que ces FX Beauties viennent bousculer en y exerçant une nouvelle fonction, sans pour autant en impacter l’organisation. L’architecte y décrit également la perception des Japonais par les Occidentaux qui y voient un « peuple à la fois enraciné dans des modes de vie inchangés depuis des millénaires et occupant également une sorte d’avenir numériquement avancé ». Un paradoxe qu’épousent les FX Beauties, puisque tout en se conformant aux rôles traditionnels de l’épouse et de la mère, elles disposent d’un nouveau pouvoir financier grâce à l’utilisation du numérique qui a pénétré les foyers.

Christine Bjerke travaille également à la publication d’un ouvrage tiré de la plateforme (On the Floating World of) the FX Beauties où seront retranscrits de nombreux essais et interviews publiés en ligne. « Le projet est une exploration de l’état d’être entre les domaines physique et numérique. J’ai donc voulu étudier à la fois le format du site web en ligne et du livre imprimé », conclut l’architecte.

 

(On the Floating World of) the FX Beauties (2013), un projet et site internet mis au point par Christine Bjerke.

On the Floating World of the FX Beauties © Christine Bjerke

On the Floating World of the FX Beauties © Christine Bjerke