Yves Saint Laurent et le Japon
Le couturier, notamment collectionneur d’art nippon, n’a cessé de s’inspirer de la culture de l'archipel depuis son premier voyage en 1963.
Yves Saint Laurent en compagnie d'une courtisane, Kyoto, avril 1963 © Droits réservés
C’est en 1963, moins de deux ans après l’ouverture de la maison de couture Yves Saint Laurent, que le couturier français découvre le Japon. Il vient, accompagné de Pierre Berger, y présenter sa collection printemps-été, grâce à l’intermédiaire de Hiroshi Kawazoe, ami de Pierre Berger et représentant de la maison au Japon. Il visite alors Tokyo, Kyoto ainsi que Nara. Une immersion dans la culture nippone que le couturier connaît déjà : Yves Saint Laurent est un collectionneur d’objets japonais, notamment de boîtes et mobiliers en laque ou de céramiques. Il multiplie également les acquisitions d’ouvrages consacrés à cette civilisation, notamment aux estampes.
« Très tôt je suis allé à la rencontre du Japon et tout de suite j’ai été fasciné par ce pays ancien et moderne et j’ai, depuis, à diverses reprises subi son influence », indique Yves Saint Laurent en 1990. « D’autres avant moi connurent cette admiration : Monet, Van Gogh et tous les artistes Art déco qui furent si importants à notre époque. Aujourd’hui, le Japon ne cesse de grandir et a réussi le miracle suprême de célébrer les noces du passé et du présent. »
Il fait référence au japonisme, ce courant artistique français puis européen qui vit les grands noms des arts, et de la peinture en particulier, s’inspirer du Japon pour leurs créations. Une tendance que poursuit Yves Saint Laurent, notamment en réinterprétant sur une veste les fleurs d’iris populaires dans les estampes. Hokusai en avait fait son sujet dans Iris et sauterelle, dont Van Gogh s’inspira pour son oeuvre Les iris (1889). Une thématique reprise par le couturier qui imagine une veste parée d’iris brodées, en 1988.
Le Japon sur les étoffes
« Je pense qu’Yves Saint Laurent, qui emprunta souvent à l’Asie, appréciait particulièrement le Japon. Sans doute est-il l’un de ceux qui ont le mieux compris la culture japonaise tant dans son approche esthétique qu’iconographique », confiait le couturier Kenzo Takada dans une conférence dédié à Yves Saint Laurent et ses liens avec le Japon. Dès les années 1970, les créations d’Yves Saint Laurent affichent des emprunts à la culture nippone : certaines robes sont brodées de fleurs de cerisiers, de glycines ou de roseaux et sa collection automne-hiver de 1994 signe un hommage aux kimonos, qu’il réinvente en manteaux d’apparat que l’on porte au dessus d’une robe, les décloisonnant des intérieurs nippons.
En 1990, est organisée au Sezon Museum of Art de Tokyo une rétrospective de son œuvre. Une première pour un couturier encore vivant. Puis en 2018, le Musée Yves Saint Laurent consacre une exposition dédiée à l’amour du créateur pour l’Asie, L’Asie rêvée d’Yves Saint Laurent où se mêlent les créations du couturier à des œuvres d’art asiatiques prêtées par le musée Guimet.
L’Asie rêvée de Yves Saint Laurent (2019), une exposition de créations d’Yves Saint Laurent organisée par le musée Yves Saint Laurent à Paris.
Réception à Korinkaku, Tokyo, 9 avril 1963. © Droits réservés
Arrivée de la maison Saint Laurent au Japon, Tokyo, 8 avril 1963. © Droits réservés
Fiche du studio dite “Feuille de Bible” d’un ensemble de soir court, hommage à Vincent Van Gogh, collection haute couture printemps-été 1988. © Yves Saint Laurent.
Ensemble de soir, porté par Valérie Jean, lors du défilé de la collection haute couture automne-hiver 1994, aloi impérial de l’hôtel Inter-Continental, Paris, 20 juillet 1994. Photographie de Guy Marineau © Yves Saint Laurent / photo : Guy Marineau
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