Jiro Ono, un maître sushi nonagénaire dans le métro tokyoïte

Il se murmure que c’est ici, sous les lames du chef Jiro Ono, né en 1927 que sont servis les meilleurs sushis du monde.

08.09.2019

TexteClémence Leleu

©City Foodsters

Certes Sukiyabashi Jiro, restaurant de sushis couronné de trois étoiles au guide Michelin, se situe dans le très chic quartier tokyoïte de Ginza. Mais pour s’y attabler, il faut s’engouffrer dans une bouche de métro, rejoindre la porte C6 et faire encore quelques pas dans un long couloir avant d’apercevoir, enfin, la devanture de cet établissement désormais mondialement connu.

Pour espérer déguster les mets de celui qui est considéré aujourd’hui comme un trésor national vivant, il faut réserver des mois à l’avance. Preuve, s’il en fallait une : un panneau affiche quotidiennement sur la porte que le restaurant est complet, ce dernier ayant même pour réputation de refuser jusqu’à 10 000 gourmets tous les mois.

 

Les meilleurs sushis du monde

« Le maître gaucher Jiro Ono crée les sushis les plus fins avec des mouvements rapides et fluides », détaille le fameux guide rouge. Derrière les vitres opaques ponctuées de lattes en bois se trouve pourtant un restaurant à l’allure des plus modestes : une dizaine de chaises devant un comptoir derrière lequel le maître et son fils Yoshikazu, drapés dans leur kimono blanc, cuisinent leur menu unique de 20 sushis différents pour un peu plus de 200 euros.

Un luxe où se pressent, en plus des gourmets tokyoïtes ou des curieux voyageurs, les plus grands noms de la gastronomie mondiale : Alain Passard, Massimo Bottura, Joël Robuchon, René Redzepi ou encore Alain Ducasse. Barack Obama, alors encore président des États-Unis, y a même partagé un repas avec le Premier ministre nippon Shinzo Abe en 2014.

 

Gardien des traditions japonaises

Sole, oursin, anguille, thon, seiche… les combinaisons sont nombreuses pour enchanter les clients. Attention toutefois, le maître sushi, s’il n’impose aucun dress code pour pouvoir passer la porte de son restaurant, mais y exige le respect de quelques règles : ne pas s’attarder une fois son plat terminé ou encore discuter tout en savourant ses sushis. Il rappelle une tradition nippone, vieille de l’époque Edo (1603-1868). « Le sushi était alors une nourriture décontractée, servie dans des stands où les clients les mangeaient rapidement avec les mains, avant de boire une tasse de thé et de quitter les lieux », précise-t-il sur son site internet. Avant de rappeler qu’à l’époque « converser pendant le repas et partager le saké ensemble, bien que fondamental aux origines des restaurants et des pubs, n’est pas habituel dans les maisons de sushi. »

Chez Sukiyabashi Jiro, le service se doit donc d’être rythmé, les plats se dégustent en silence et les verres de saké sont remplacés par des tasses de thé, qui permet de débarrasser le palais de tout arrière-goût avant de poursuivre sa dégustation. Par ailleurs, aucune trace de sauce soja sur le comptoir. Les sushis sont préalablement assaisonnés à la sauce soja nikiri de façon subtile, afin de ne pas dénaturer le goût du riz vinaigré ou du poisson. Pas non plus la moindre trace de gingembre ou de wasabi.  

Sachez enfin que les appareils photo sont interdits par le chef. « Le seul moyen sûr de savourer nos sushis est de se concentrer sur les repas. Lorsque vous partirez, nous nous ferons un plaisir de prendre une photo commémorative pour vous à la porte si vous le souhaitez. » Le prix d’un instant inoubliable. 

©City Foodsters

©City Foodsters

©City Foodsters

©City Foodsters

©City Foodsters

©City Foodsters

Sukiyabashi Jiro

4-2-15 Ginza, Chuo-ku, Tokyo 104-0061