La culture culinaire Taïwanaise de plus en plus populaire en France

Focus sur trois des nombreux établissements promouvant la diversité des thés, de la gastronomie ou des douceurs de Taïwan ces derniers temps.

08.07.2025

TexteRebecca Zissmann

Les pains “polo” taïwanais de la boulangerie Petite Île, encore plus délicieux tartinés d’une épaisse couche de beurre salé. © Rebecca Zissmann

À Paris ces dernières années, les établissements promouvant la diversité des thés, de la gastronomie ou des douceurs de Taïwan se multiplient. Focus sur trois lieux qui incarnent la richesse des saveurs de l’île avec une pointe de modernité.

Pain au levain et brioches à la taïwanaise à la boulangerie Petite Île

Les brioches taïwanaises fourrées au beurre “naisu” de la boulangerie Petite Île. © Rebecca Zissmann

D’abord Product Designer spécialiste du laser, Chih-Ya Wang attrape le virus de la pâtisserie pendant ses études. Elle est alors réputée dans son cercle d’amis pour la maîtrise de ses macarons. Un jour, un professeur de retour du Japon, où il a expérimenté la fabrication du pain, fait une comparaison inattendue. Le travail du pain s’apparente à celui du verre, chaque cuisson venant avec son lot d’inattendu. La curiosité de Wang, férue de travaux manuels, est piquée au vif.

C’est lors d’un voyage à Paris en 2017 pour assister au salon de design Maison&Objet qu’elle et son mari Po-Hsuan Chuang tombent amoureux de la ville. Wang s’inscrit alors à l’école Ferrandi où elle étudie les secrets du pétrissement et du levain auprès de Didier Chaput avec l’idée d’ouvrir sa propre boulangerie. C’est chose faite après le Covid avec Petite Île dont la décoration brute et recherchée a été imaginée par Chuang. D’abord concentrée sur l’apprentissage du pain au levain, qu’elle fabrique désormais elle-même, Wang confectionne de sublimes pains longue fermentation avec trois types de farine. Après trois jours de fermentation, ils développent un goût original légèrement acidulé.

Wang n’a pas immédiatement pensé à intégrer son héritage taïwanais dans son offre. À la suggestion de Chuang, elle décide néanmoins d’initier sa clientèle parisienne aux pâtisseries taïwanaises et notamment à ses brioches. Si l’île n’a pas une grande culture du pain, ces dernières y sont très populaires, en version sucrée comme salée. À Petite Île, la brioche taïwanaise innove par sa couche extérieure beurrée et surtout par son intérieur fourré de beurre naisu fait maison (un mélange de lait, œuf et sucre glace dont les Taïwanais raffolent).

Les familiers du melon pan japonais, eux, ne seront pas dépaysés par la version de Wang. À Taïwan, le polo (ou bolo, « ananas ») est un petit pain au lait très populaire, dont le dôme est aussi quadrillé à la manière d’une peau de fruit. Sa version taïwanaise est un petit peu plus foncée que son cousin japonais. À Petite Île, il se déguste à la française, coupé en deux et généreusement tartiné de beurre salé. Un délice à la rencontre des deux cultures.

Wang avait aussi à cœur de proposer une offre salée. Là encore, elle amène une touche taïwanaise en ajoutant de la ciboule à la garniture double fromage de ses mini-sandwichs, en écho aux petits pains à la ciboule, très populaires à Taïwan. Île du syncrétisme culinaire, la patrie de Wang et Chuang réserve de belles surprises aux amateurs de boulangerie autant que de gastronomie taïwanaise. Un mélange des saveurs qui a désormais pignon sur rue à Paris chez Petite Île.

Petite Île

Adresse : 8 rue des Filles du Calvaire, 75003, Paris

Ouverte de 8h à 18h du mardi au samedi et de 9h à 14h30 le dimanche.

Fermée le lundi.

www.instagram.com/petite.ile.paris/

Chih-Ya Wang confectionne des pains au levain dont le délicieux pain à longue fermentation. © Rebecca Zissmann

Chih-Ya Wang et Po-Hsuan Chuang devant la boulangerie Petite Île dans le quartier du Marais à Paris. © Rebecca Zissmann

Laïzé, temple du thé à emporter taïwanais

Le bubble tea façon Laïzé, un subtile équilibre d’ingrédients de qualité sublimé par les arômes de thés taïwanais d’exception.

À Taïwan, le thé fait partie intégrante du quotidien, du prestigieux Oolong au moderne bubble tea. Avec le salon de thé Laïzé, Jody Liu et Stéphane Lim ont voulu partager la diversité incroyable de thés, de méthodes de préparation et d’associations innovantes de leur île d’origine. Pour eux, cela signifiait revenir à l’origine du thé à emporter pour en proposer une version contemporaine où les paramètres peuvent être personnalisés. Chacun choisit ainsi librement la température, le niveau de sucre ou encore les garnitures éventuelles qui viendront complimenter l’essence de la boisson, des thés finement sélectionnés.

Cultivées sur le plateau de Pakua au centre de Taïwan les variétés proposées révèlent de riches arômes parfumés, à savourer bruts ou accompagnés d’un nuage de lait. Dans la boutique historique du Marais, des thés d’exception sont servis en quantité limitée tels que le thé oolong d’or, au goût élégant et délicat ou le thé oolong kimsuan aux arômes presque lactés. En été, rien de mieux que d’y déguster un thé vert au pamplemousse pressé qui apporte une sensation de fraîcheur, en répit à la chaleur urbaine.

Clin d’œil à la médecine traditionnelle taïwanaise, les murs de la boutique et leurs nombreux tiroirs sont inspirés d’une ancienne pharmacie de Tainan. Le thé lui-même a longtemps été considéré comme une plante médicinale à Taïwan. C’est en hommage à l’importance de cette boisson dans la culture taïwanaise que les deux fondateurs, anciens élèves d’une école de mode, ont imaginé un espace épuré, qui fait la part belle à l’expérience. Cet espace, ils le conçoivent comme un lieu ouvert aux échanges et collaborations, dans l’esprit de leur nom puisque Laïzé signifie « venez vous asseoir en tant qu’ami ». Parmi leurs récentes collaborations, le duo a accueilli la marque de vêtements Ami Paris ou les vases de la Taïwanaise Pieces of Jade.

L’esprit d’ouverture de Laïzé s’est traduit par l’ouverture de deux autres salons parisiens, dont celui de Sainte-Avoye dédié aux cafés puisque Taïwan en est le troisième plus gros consommateur en Asie. Le café s’y redécouvre à la mode taïwanaise, en particulier avec le Tainan blend aux saveurs rondes et complexes, torréfié par ST.1 Tainan. Laïzé prévoit désormais un retour aux sources. Fin 2025, deux adresses ouvriront leurs portes à Tainan au sud de Taïwan, dont une dédiée à la première marque de café de la maison. Une manière pour ces promoteurs de l’art de vivre taïwanais de prendre place au cœur de la dynamique culture culinaire de leur île.

Laïzé

Adresse : 19 rue de Montmorency, 75003, Paris

Téléphone : 09 87 09 15 75

Ouvert de 12h30 à 19h du lundi au jeudi et le dimanche. Ouvert de 12h30 à 22h le vendredi et le samedi.

fr.laizeparis.com/

En été, le thé vert au pamplemousse pressé est plébiscité pour son acidité désaltérante.

Nouveau venu chez Laïzé, le café à la taïwanaise met en valeur des crus torréfiés à Tainan.

Avec son intérieur évoquant une ancienne pharmacie taïwanaise, Laïzé Marais rend hommage aux vertus médicinales du thé.

Foodi Jia-Ba-Buay, plats emblématiques et pépites de Taïwan

Le porc haché braisé aux cinq épices du Lu Rou Fan, spécialité emblématique de Foodi Jia-Ba-Buay.

S’il est une figure incontournable de la gastronomie taïwanaise en France, il s’agit de Virginia Chuang. Installée à Paris depuis une vingtaine d’années, cette native de Taipei a participé à l’ouverture du premier salon de bubble tea en France en 2003 et a longtemps organisé des ateliers de cuisine taïwanaise très courus. Depuis une dizaine d’années, c’est au sein de son propre restaurant que la chef officie et met en valeur les somptueuses saveurs de son île d’origine.

Au menu, des plats emblématiques de Taïwan comme la soupe de nouilles au bœuf Niú Ròu Miàn ou les populaires brioches Gua Bao, fourrées au porc braisé aux feuilles de moutarde. Le porc tient la vedette sur la carte, qu’il soit haché et braisé aux cinq épices dans un Lu Rou Fan fondant sur lit de riz, sauté avec des tiges d’ail et une sauce épicée aux haricots noirs fermentés pour la spécialité estivale « têtes de mouche » ou bien en poitrine assaisonnée de poivre de montagne, une recette traditionnelle des aborigènes taïwanais. Car Chuang tient à mettre en valeur la diversité culinaire de Taïwan à travers des plats issus de différentes régions et communautés, comme celle des Hakkas dont Foodi Jia-Ba-Buay propose la recette de pâtes de riz sautées. La cheffe innove même en ajoutant une touche locale à certaines recettes comme la galette aux ciboules et à l’ail des ours, devenue l’une des signatures du restaurant.

Dans un cadre épuré ponctué de mobilier en bois foncé, de nombreux convives goûtent la cuisine taïwanaise pour la première fois. « Souvent, il s’agit pour eux d’un vrai coup de cœur pour la richesse des saveurs et la diversité des plats », confie Chuang. Une découverte qui les pousse à revenir, notamment pour les spécialités saisonnières des célébrations traditionnelles comme le Nouvel An chinois ou Zongzi, la fête des bateaux-dragons. A l’avenir, d’autres pans de la cuisine taïwanaise pourraient s’inviter à la carte, notamment en hommage à la street-food de l’île. Foodi Jia-Ba-Buay constitue donc la porte d’entrée idéale pour découvrir ou approfondir sa connaissance de la gastronomie taïwanaise, une saveur après l’autre.

 

Virginia Chuang est aussi l’autrice du très accessible livre de recettes Easy Taïwanpublié aux éditions Mango.

À son initiative, le site Taïwan Style en France regroupe les restaurateurs taïwanais installés en France (dont Laïzé), un point de départ idéal pour d’autres découvertes gustatives.

Foodi Jia-Ba-Buay

Adresse : 2 rue du Nil, 75002, Paris

Téléphone : 01 45 08 48 28

Ouvert de 12h à 14h30 et de 19h à 21h45 du lundi au mercredi. Ouvert de 12h à 14h30 et de 19h à 22h le jeudi et le vendredi. Ouvert de 12h à 15h et de 19h à 22h le samedi.

Fermé le dimanche.

www.foodi-jia-ba-buay.fr

Les pâtes de riz sautées à la façon des Hakkas.

La galette aux ciboules de Virginia Chuang, agrémentée à l’ail des ours.

Virginia Chuang et son livre de recettes “Easy Taïwan”, paru aux éditions Mango.