Repas de minuit : entrez dans la peau d’un salaryman !

23.10.2019

TexteRebecca Zissmann

©Agathe Hernandez

En France, les soirées bien arrosées se terminent souvent par un sandwich, kebab ou autres crêpes à emporter qui épongent les excès. Au Japon, direction les ramen-ya (restaurants de ramen) ouverts après minuit pour un bouillon réconfortant et nourrissant à faire oublier même les pires abus.

Dans l’archipel, boire fait souvent partie des obligations salariales. Les nomikai (littéralement « réunions pour boire ») entre collègues après une journée de travail sont plus que de simples moments de rapprochement. Elles permettent de relâcher les tensions et de braver les inhibitions qui empêchent habituellement un employé de se plaindre à son supérieur, par exemple. Très codifiées, ces sorties incitent à la consommation d’alcool et donnent libre cours aux excès, pardonnés dès le lendemain. D’où la vision originale mais somme toute banale d’hommes d’affaires en costume, les salaryman, titubant dans les rues des grandes villes en début de soirée.

Il n’est pas rare que ces équipées aillent se remettre d’aplomb dans un restaurant ouvert toute la nuit, souvent un ramen-ya. Ici, pas de jugement, rien qu’un bol de soupe où nagent quelques nouilles. Certains restaurants comme la chaîne Ichiran proposent même de limiter les interactions des clients avec le personnel. La commande du ramen s’effectue à un distributeur où l’on reçoit un ticket numéroté correspondant à un siège. On prend alors place à un comptoir équipé d’un volet roulant, séparé des autres clients par des parois qui forment un genre de box, pour plus d’intimité. Le volet se soulève au moment où le serveur apporte le bol de nouilles et ce, sans que l’on ne voie son visage ni lui le nôtre, et sans qu’une parole ne soit échangée. Quoi de plus tranquille pour un diner nocturne !

A Paris, Le Fooding s’associe à la marque de bière Asahi pour lancer l’évènement Bouillon de Minuit cet automne. L’occasion de vivre dans nos bistrots parisiens l’expérience du ramen de minuit (Midnight Ramen) des salaryman japonais. Treize chefs proposent d’organiser cinquante diners nocturnes, en formule entrée-plat-dessert -et bière !-, bien française, pour vingt euros. Une aubaine pour les nostalgiques des fêtes tokyoïtes. D’autant plus que certains des « sophistroquets » qui participent à l’initiative sont idéalement situés à proximité des grands lieux de la nuit parisienne. Citons par exemple la cantine japonaise Peco Peco du quartier Pigalle ou encore Le Restaurant du Badaboum, pour enchaîner fête et blanquette avec aisance.

Ceux qui ne seraient pas encore prêts à tenter eux-mêmes l’expérience peuvent se réconforter devant la série Netflix « Midnight Diner ». Adaptée du manga éponyme de Yarō Abe, elle met en scène le propriétaire d’une gargote du quartier nocturne de Shinjuku où se succèdent des clients des plus étonnants. Des scénettes au comique débordant couplées à des plans de plats traditionnels plus ragoûtants les uns que les autres qui donneront l’énergie nécessaire à franchir le pas… de la porte des bouillons de minuit parisiens. Et que la nuit soit bonne !

Left: ©Marine Bidaud / Right: ©Matthieu Jauniau-Dallier

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