Un blanc corsé inspiré par le dashi japonais

07.10.2019

TexteMiyuki Katori PhotographiesYosuke Owashi

Mongaku Valley

À Yoichi, sur l’île d’Hokkaido, s’étend un domaine appelé Mongaku Valley (Vallée de Mongaku). Ce coteau nord qui descend en pente douce fait face au superbe paysage de la baie de Yoichi  et du cap Shiripa, symbole de la ville. C’est dans ce cadre que Shigeaki Kihara et sa femme Yuko cultivent leur vigne et produisent leur vin.

Le couple Kihara a voulu un vin construit autour d’un mélange de différents raisins. Ils ont réussi le pari d’élaborer un vin issu uniquement de leur propre vignoble en choisissant soigneusement les cépages et la proportion de chacun.

Désireux de produire des vins blancs, ils ont pourtant utilisé pour base le pinot noir. Ils l’ont ensuite associé à des cépages de même famille – pinot gris, pinot blanc, chardonnay (qui fait partie des pinots noirs) – avant de compléter avec du sauvignon blanc pour la délicate touche d’amertume.

Kihara raconte: « L’idée m’est venue en pensant au mélange de bonite et d’algue konbu du bouillon japonais. L’émulation mutuelle de l’animal et du végétal m’a fait réfléchir à cette association contradictoire, et je me suis dit que ça ne pourrait pas forcément fonctionner avec le vin, donc j’ai choisi par principe un même type de raisins pour l’équilibre. »

Les grappes entières sont pressées par lot, le plus délicatement possible, et le mélange est laissé à reposer. Le jus clair est ensuite séparé, avant d’y ajouter un mélange de levures indigènes qui va initier la vinification. On contrôle scrupuleusement la pureté du raisin pour que la fermentation naturelle se déroule bien, et en fonction de l’année une petite quantité de moût de raisin est parfois utilisée comme déclencheur.

C’est ainsi que le Mongaku Valley a vu le jour. Sa robe est légèrement foncée pour un blanc, en raison peut-être de la présence dominante du pinot noir. La première gorgée est à l’image de sa teinte, c’est la saveur corsée qui vient en premier. Mais l’acidité suit très vite, accompagnée d’une belle longueur en bouche. C’est un blanc, mais avec cette complexité qui le différencie des mono-cépages.

Ce vin, qui saisit par sa fraîcheur persistante, est la parfaite sublimation de la belle nature de Mongaku.

Mongaku Winery

Superficie du vignoble / ± 2 ha

Vignerons récoltants /Shigeaki et Yuko Kihara

Cépages et région / Pinot noir, pinot gris, pinot blanc, chardonnay, sauvigonon blanc, etc... (Hokkaido, région de Shiribe, ville de Yoichi)

Conditionnement / 750ml  

Prix / ¥5000(taxe incluse)

Vinification / Presse des grappes entières, avant de laisser le jus reposer en cuve, puis fermentation du jus clair par des levures indigènes. Ajout d'une petite quantité de sulfite (métabisulfite des potassium) trois fois au maximum - au moment de la presse, au moment du mélange, et juste avant la mise en bouteille (un seul ajout, au moment du mélange, pour la production de l'année 2017). Ni chaptalisation, ni correction d'acidité, ni filtrage, ni collage.

Culture / investissement limité, faible impact sur l'environnement, culture enherbée sans labour. Pesticides à base de produits certifiés biologiques dès la troisième année de récolte (bouillie bordelaise et Bacillus subtilis natto) et appliqués en principe une fois par an. Plusieurs vaporisations sur les feuilles d'un mélange de fertilisants fabriqué en partie sur place. Engrais préparé au vignoble avec un mélange de fumier de vache et de coquille d'oursin.

mongakuwinery.com

※ Dans cette série d’articles sur le vin naturel, nous présentons des vins naturels et en biodynamie, produits dans le meilleur respect possible de la nature, depuis la pratique culturale du raisin jusqu’à la vinification. Par « fabriquer naturellement », nous entendons « limiter au maximum l’intervention humaine ». Ainsi, la vinification doit se faire sans addition de sulfites au moment du cuvage ou de la mise en bouteille. Les intrants doivent être réduits au strict minimum, et le vigneron recourir aux levures indigènes – en opposition aux exogènes – pour diriger la vinification, sans aucun ajout. Il s’agit aussi de ne pas chaptaliser ni corriger l’acidité, de n’utiliser aucun agent de collage, ni filtre. » En ce qui concerne la pratique culturale, elle est supposée ne faire aucun usage de pesticides chimiques, mais les conditions climatiques du Japon rendant l’agriculture biologique très compliquée, une utilisation a minima des pesticides est parfois nécessaire. D’autre part, nous partons également du principe qu’il n’est fait usage d’aucun herbicide ni engrais chimique. Arriver à produire un vin selon ces méthodes implique de pouvoir cultiver des raisins sains et consacrer une attention scrupuleuse à la vinification. Dans cette série d’articles, nous vous présentons des vignerons, et les vins qu’ils fabriquent en cultivant la vigne aussi naturellement que possible dans le respect du climat local.