À l’étranger, les vestiges de l’occupation japonaise
Le photographe Shitamichi Motoyuki a retrouvé les traces des tentatives impériales du Japon qu'incarnent ces portails à l'abandon.
“torii”, Shitamichi Motoyuki
Au fil de son Histoire et au gré de ses conquêtes territoriales, le Japon a laissé dans son sillage des traces de son occupation sous la forme des torii. Ces grandes portes, souvent placées à l’entrée des temples shintoïstes ou d’autres lieux spirituels, marquent la frontière entre le monde sacré du sanctuaire et le monde extérieur, considéré comme profane. C’est à ces symboles que s’est intéressé le photographe japonais Shitamichi Motoyuki dans la série torii, publiée en 2013.
Né en 1978 et diplômé de la Musashino Art University, Shitamichi Motoyuki travaille sur l’archéologie contemporaine, notamment sur les vestiges des guerres et présences japonaises. Il a participé en 2019 au projet du pavillon japonais à la Biennale de Venise, s’associant à un anthropologue, un architecte et un compositeur, autour de la question de la coexistence des humains avec le « non-humain ».
Une symbolique envolée
Parmi les territoires où les autorités japonaises ont construit ces torii, entre la Période Meiji (1868-1912) et la fin de la Seconde Guerre mondiale, se trouvent les îles Mariannes du Nord (États-Unis), la région de Sakhaline (Russie), l’ancienne région de Mandchourie (Chine), Taiwan ou la Corée du Sud. Si les torii ont été détruits en Corée du Sud après la guerre, ils demeurent en place dans de nombreux autres territoires, où ils ne sont plus que des formes sans aucune dimension symbolique. Ce dernier point est au cœur du travail de Shitamichi Motoyuki, dont la recherche porte ici sur la manière dont la symbolique d’un lieu ou d’une sculpture peut disparaître.
Depuis 2006, l’artiste a ainsi visité nombre de torii, notamment à Saipan, dans les Mariannes du Nord, où ces portails sont restés intacts dans les cimetières. A Taichung, Taiwan, Shitamichi Motoyuki photographie un torii couché sur la pelouse d’un parc, où il est utilisé comme banc. En Chine, à Changchun, l’artiste montre également un torii qui a trouvé sa place au dessus d’un portique, à côté d’un magasin.
Une série précédente, réalisée entre 2001 et 2005, intitulée Bunkers, permet de découvrir de quelle manière ces abris militaires se sont intégrés et fondus dans l’environnement urbain.
torii (2013), une série photographique par Shitamichi Motoyouki publiée par Michi Laboratory.

“torii”, Shitamichi Motoyuki

“torii”, Shitamichi Motoyuki

“torii”, Shitamichi Motoyuki
“torii”, Shitamichi Motoyuki

“torii”, Shitamichi Motoyuki
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