Entre chute et renaissance, l’équilibre incertain de Kosai Hori
Le peintre, personnalité du mouvement anti-art, questionne dans sa série “The Garden of the Fall and Rebirth” le cycle perpétuel de la vie.
© Kosai Hori
« Je ne désespère pas de l’inéluctabilité de la chute, mais j’espère insuffler de la vie aux nouveaux bourgeons de croissance. » Voici comment Kosai Hori décrit sa série de peintures intitulée The Garden of the Fall and Rebirth, conçue entre 2015 et 2019. Sur les toiles se mêlent une multitude de traits, une superposition de lignes, un entrelacement donnant aux œuvres des airs de broderie. Des œuvres conçues à partir d’un maillage de plusieurs matières : encre japonaise, pigments minéraux, fusain, crayon, peinture à l’huile, pastel et feuille d’argent.
Kosai Hori est né en 1947 à Takaoka, dans la préfecture de Toyama, sur la côte de la mer du Japon. Diplômé en 1967 du département de peinture de l’Université des Beaux-Arts de Tama, l’artiste se politise très vite en créant le Bikyoto, le Conseil de lutte conjointe des artistes, mouvement anti-art qui remet en question la nature très institutionnalisée du milieu. Sa carrière décolle dans les années 1970, alors que le Japon est secoué par des manifestations étudiantes. Son style, mêlant minimalisme, art conceptuel et performance, lui vaut d’être exposé à la Biennale de Paris en 1977 et à celle de Venise en 1984.
Un hommage au 11 mars 2011
C’est après une promenade mémorielle sur la côte de Miyagi, touchée par la catastrophe de mars 2011 que l’artiste se lance dans The Garden of the Fall and Rebirth. Alors que sa femme lui lit les notes prises lors de son séjour dans la région du Tohoku, l’artiste laisse aller ses mains sur la toile, la marquant de ces traits qu’il envisage comme « des graffitis, un bruit, voire une prière » et questionne ainsi la boucle perpétuelle qu’est l’existence, faite de chute et de renaissance.
Quant à la mention de « jardin », Kosai Hori l’explique ainsi : « Ce jardin qui, je suppose, provient du récit biblique, est lié à la volonté de l’homme qui, après avoir été chassé, doit se ranger du côté de la “mortalité”. Peut-être que l’histoire que je souhaite créer ne peut-elle être racontée qu’à partir de ce lieu de mortalité ». Avant de poursuivre, « ou peut-être est-ce le lieu dont j’ai parlé il y a longtemps, celui où je ne me tiens pas simplement à la “ligne de démarcation”. Peut-être est-ce mon champ de bataille pour continuer à révolutionner l’acte de peindre. »
L’artiste a compilé les oeuvres de cette série ainsi que d’autres créées dans la foulée de son séjour à Miyagi dans un ouvrage intitulé Horobi to saisei no niwa, paru en 2014.
© Kosai Hori
© Kosai Hori
© Kosai Hori
© Kosai Hori
© Kosai Hori
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