“Internal Notebook”, portrait intime de l’enfance battue
La photographe Miki Hasegawa recueille les témoignages d’anciens enfants maltraités dans son ouvrage, mêlant récits et photographie.

© Miki Hasegawa
Internal Notebook est un projet qui a mûri pendant de longues années. Tout commence en 2009, alors que Miki Hasegawa est enceinte de sa fille. La grossesse lui révèle la pression et les exigences imposées aux mères par la société japonaise. « J’avais l’impression que j’aurais pu être capable de maltraiter mon enfant, étant donné l’état psychologique dans lequel je me trouvais », détaille la photographe dans une interview à Pen. « Je me suis alors rendue compte que la maltraitance n’est pas commise par des parents à part, mais que cela peut être le fait de n’importe qui. »
Celle qui s’est lancée dans une carrière de photographe après son accouchement, délaissant alors son métier d’architecte, décide de s’informer sur la maltraitance infantile et sur les difficultés auxquelles les enfants maltraités doivent faire face. « Un acte nécessaire afin de ne pas devenir une mère abusive », concède celle qui place les problématiques liées aux femmes et aux enfants au coeur de son travail photographique.
Quatre ans pour recueillir la parole des victimes
Pendant quatre ans, elle rencontre dans tout l’archipel des adultes ayant été victimes de violence, dans un climat propice aux confidences. « Je les rencontrais chez eux ou dans un lieu où personne ne pouvait les entendre. Ils pouvaient choisir de mettre fin à la rencontre à tout moment, voire l’annuler s’ils ne souhaitent plus parler. Je pense que cette liberté les a incité à se confier », indique Miki Hasegawa.
La photographe passe ainsi environ cinq heures avec chaque témoin, les laissant raconter leur histoire en intervenant le moins possible et clôture l’entretien par un portrait. « J’avais l’impression qu’ils étaient opprimés par les normes sociales. Intimement persuadés que ces abus sont des choses dont on ne doit pas parler ».
Internal Notebook est la somme de toutes ces rencontres. Un ouvrage, à la structure complexe, construit sur plusieurs niveaux, que la photographe a imaginé comme une métaphore de la complexité de ce sujet dans la société japonaise. Avec un but clair : initier une réflexion sur la manière de résorber ces violences. « La maltraitance infantile laisse des traces invisibles. En feuilletant les pages du livre, on peut entendre leurs cris. »
Internal Notebook (2019), un livre de photographies de Miki Hasegawa, publié aux éditions Ceiba.

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa

© Miki Hasegawa
LES PLUS POPULAIRES
-
“Les miracles du bazar Namiya”, correspondance fantastique
Dans ce roman de Keigo Higashino, trois amis sont amenés à modifier la réalité par l'intermédiaire de lettres dont ils sont les destinataires.
-
William Klein, un Américain dans le Japon d’après-guerre
Dans son ouvrage “Tokyo 1961”, à la manière d’un photo-journal, le photographe documente un pan de la société japonaise hors norme.
-
Taketomi, une île figée dans le temps
Ici, pas de route goudronnée, d’immeuble de plusieurs étages ni même de “konbini”, ces petites supérettes pourtant incontournables au Japon.
-
Lily Deakin a retrouvé l'insouciance de l'enfance grâce à la pole dance
Malgré les clichés hypersexualisés qui l'entourent, cette discipline qui apporte force physique et confiance en soi se développe au Japon.
-
Les enfants-robots futuristes du céramiste Shigeki Hayashi
S'inspirant de la céramique traditionnelle de sa région natale, l'artiste façonne des sculptures d'humanoïdes dignes de science fiction.