“Seito”, la première revue féministe japonaise
Pionnier dans la défense des droits des femmes au Japon, ce magazine a permis de débattre de thèmes comme la libre sexualité ou l'avortement.

Première couverture de la revue “Seito”, dessinée par Chieko Naganuma. Avec l'aimable permission de Okumura Naofumi.
Le féminisme japonais moderne peut être affilié à Seito, une revue envisagée comme féministe mais non qualifiée comme telle par ses créatrices, publiée tous les 1er du mois de 1911 jusqu’en 1916. Si, à l’origine, le magazine se concentre sur la littérature féminine, son orientation change peu à peu pour embrasser le thème de la libération des femmes et l’égalité entre les sexes. Seito, nom inspiré du mouvement anglais Bluestockings signifiant “bas-bleu” en français, devient alors le lieu de débats sur des thèmes aussi modernes que l’oppression des institutions patriarcales, la démystification de la famille ou la sexualité. Avec pour ambition l’émergence d’une prise de conscience personnelle par les femmes de leurs droits, plus qu’une visée politique.
Un succès qui dépasse les cercles intellectuels
C’est en septembre 1911 que paraît le premier numéro, sous la direction de Raicho Hiratsuka, alors entourée de quatre autres auteures toutes diplômées de la faculté pour femmes du Japon. Parmi les contributrices de Seito, on peut citer la poétesse et partisane des droits des femmes Akiko Yosano et la romancière Nobuko Yoshiya. Des plumes renommées qui lui permettent de jouir d’une bonne presse, notamment auprès des intellectuels, et d’élargir son audience à travers tout l’archipel, auprès de femmes avides de changements dans le contexte très normatif de la fin de l’ère Meiji.
La revue est surveillée de près par le Ministère de l’Intérieur japonais, car elle contrevient aux lois de 1900 de préservation de la paix interdisant toute critique du système en place. Cette surveillance conduit à la censure de deux numéros. En 1915, Raicho Hiratsuka transmet la direction de Seito à l’anarchiste Noe Ito. Celle-ci y développe de nombreuses réflexions sur l’avortement, l’amour libre ou encore la prostitution. Mais alors que les membres historiques se détournent peu à peu de la publication, Noe Ito choisit de clôturer cette aventure un an plus tard, en février 1916.
Reste que l’héritage de Seito est toujours revendiqué aujourd’hui par les défenseurs des droits des femmes, qui reprennent régulièrement l’imagerie qu’employait la revue il y a plus d’un siècle pour faire passer leurs messages.

Membres de la revue “Seito” peu après la parution du premier numéro du magazine. Raicho Hiratsuka figure tout à droite. Avec l'aimable permission de Okumura Naofumi.

Membres de la revue “Seito” deux ou trois ans après la parution du premier numéro. Raicho Hiratsuka est la deuxième femme en partant de la droite. Chieko Naganuma est assise au centre. Avec l'aimable permission de Okumura Naofumi.

Portrait de Raicho Hiratsuka. Avec l'aimable permission de Okumura Naofumi.
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