Atsuko Barouh, le strip-tease et l’utopie d’une féministe
Dans la série “Pole Dancer”, l’artiste japonaise met en scène des femmes épanouies, qui exposent leur sensualité.

© Atsuko Barouh
Dans le shintoïsme, Amaterasu est la déesse du Soleil. Après un contentieux avec son frère, elle se cloître dans une grotte, et plonge le monde dans l’obscurité. Les autres divinités décident alors d’organiser un banquet face à la grotte, lors duquel la déesse Ame no Uzume se met à danser, allant même jusqu’à effectuer ce que l’on pourrait qualifier de strip-tease. Le bruit et l’effervescence provoqués amènent Amaterasu à légèrement déplacer le rocher, permettant à un homme de le pousser et ainsi permettre à la déesse de sortir.
L’artiste japonaise installée à Londres, Atsuko Barouh, utilise ce récit pour illustrer sa réflexion dont est née la série d’œuvres Pole Dancer – Strength in Revealing Weakness. Oui, une strip-teaseuse a sauvé le monde. Que retenir de ce fait ? C’est en fréquentant à l’automne 2019 un club de Shoreditch, en observant l’épanouissement apparent de ces femmes que l’artiste a souhaité réfléchir à la question et creuser ce sujet.
« La libération et le danger de la sexualité »
« Pourquoi ces jeunes et jolies athlètes ouvrent-elles leurs jambes, montrant même leurs trous du cul ? Quel genre d’expériences traumatisantes ont-elles vécu ? Quel genre d’enfance malheureuse ont-elles eu ? » Voici les questions ouvertes par l’artiste en regardant les danseuses du club.
Dans une société encore dominée par les hommes, où le nu féminin est immédiatement sexualisé, il a le « pouvoir de captiver les gens. Mais d’un autre côté, cela affaiblit également les femmes, car il est nécessaire de pouvoir se protéger des personnes indésirables que cela attire. Plus vous vous cachez, plus les hommes veulent en voir. Alors quand on s’ouvre et expose tout, comme une strip-teaseuse, la puissance est maximisée », poursuit Atsuko Barouh dans le texte associé à la série.
À travers ses coups de pinceaux, l’artiste inscrit sur le papier des formes féminines, fières, faisant fi des risques de violence sexuelle qui inhibent et contraignent la vie des femmes. Ici, les danseuses évoluent dans un cadre qu’elles ont choisi, elles s’amusent, sont libres. « J’ai représenté la libération et le danger de la sexualité qui se jouent dans un lieu comme celui-ci », poursuit l’artiste. Pourtant, « un tel sentiment de liberté ne dure qu’un court instant. C’est une liberté rendue possible grâce à la mise en équilibre de pouvoirs qui existent dans un lieu particulier en vertu d’un accord où le contact physique est interdit. »
Pole Dancer – Strength in Revealing Weakness (2019), une série d’Atsuko Barouh à retrouver sur le site internet de l’artiste.

© Atsuko Barouh

© Atsuko Barouh

© Atsuko Barouh

© Atsuko Barouh
LES PLUS POPULAIRES
-
« C’est un plaisir sincère que mes objets soient reconnus comme appartenant au cercle du Mingei »
Les couverts de laiton soigneusement façonnés par Ruka Kikuchi dans son atelier de Setouchi sont appréciés dans tout le Japon et ailleurs.
-
“Buto”, la danse des ténèbres révolutionnaire
Né dans un contexte d’après-guerre rythmé par des mouvements contestataires, cet art subversif rejette les codes artistiques traditionnels.
-
L'audace d'après-guerre du mouvement japonais Gutai
Ce courant incarne le renouveau de l'art japonais en apportant une importance considérable aux matériaux et à la performance.
-
Les hommes de bois de Nagato Iwasaki
Dans sa série “Torso”, l'artiste sculpte des statues d’hommes et femmes à partir de bois flotté, qu’il place ensuite dans la nature.
-
AD DESIGNLe nouveau siège social de Takeda : entre tradition et innovation
L'entreprise pharmaceutique Takeda, l’une des entreprises leader les plus anciennes du Japon. Elle a récemment établi son nouveau siège social à Tokyo.




