David Favrod photographie ses deux identités, japonaise et suisse

Mishiko, 2012 ©David Favrod
Dans une inlassable quête d’identité, le photographe helvético-japonais David Favrod met en scène ses racines japonaises et suisses dans des récits de fictions photographiques.
Né à Kobe d’une mère japonaise et d’un père suisse, David Favrod n’a que six ans lorsqu’il quitte le Japon pour la Suisse. À 18 ans, il effectue une demande de double nationalité auprès de l’ambassade japonaise qui la refuse, celle-ci étant seulement accordée aux femmes japonaises qui souhaiteraient prendre la nationalité de leur conjoint. Ce sentiment de rejet, couplé à sa volonté d’affirmer son identité façonnée par deux cultures si différentes l’une de l’autre, finit de le convaincre d’entreprendre des travaux photographiques.
David Favrod s’adonne donc, dès la fin de ses études à l’école d’art de Lausanne, à des mises en scène réalisées en Suisse qui intègrent les mythes japonais et histoires racontées par sa mère ou ses grands-parents, les spécificités de la culture japonaise et sa part d’ombre comme les années de guerre. Il reconstitue en Suisse un Japon qu’il ne connait que trop peu, dans diverses séries semblables à deux journaux intimes qui rendent compte de son histoire familiale et de ses états d’âme face à l’universelle question : “Qui suis-je ?” Dans sa biographie, il écrit : “Pour un Suisse je suis un Japonais et pour un Japonais je suis un Suisse ou plutôt un gaijin (mot japonais désignant un étranger).”
Dans une tentative de réponse, David Favrod a constitué la série “Gaijin” où des symboles japonais comme le bonsaï, Godzilla, un sumo ou une geisha viennent se fondre sur des portraits de famille ou des autoportraits avec les montagnes suisses en toile de fond.
Une autre de ses séries, “Hikari”, signifiant littéralement la lumière en japonais, reconstitue les souvenirs de ses grands-parents : la Seconde Guerre mondiale, la maladie qui avait emporté leurs sœurs, la honte, le soulagement une fois cet épisode terminé. Tous ces éléments s’imbriquent dans une source inépuisable d’inspiration pour David Favrod qui retranscrit par exemple dans ses photographies le récit de l’attentat à la bombe de Kobe, une histoire qu’il n’a pas vécue mais qui fait partie intégrante de son histoire familiale.

Pour Sadako, 2012 (For Sadako) ©David Favrod

Autoportrait en poulpe, 2009 (Self-portrait in octopus) ©David Favrod

Le Dôme, 2009 (The Dome) ©David Favrod
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