Des photos colorisées de tatouages de yakuza de l’ère Meiji

Des photographes du XIXème siècle ont capturé les corps recouverts de tatouages, souvent dissimulés, des membres du crime organisé japonais.

14.09.2020

TexteClémence Leleu

‘Japanese Tattoo’ ; Kusakabe Kimbei or Baron Raimund von Stillfried.

Sur ces clichés pris à l’apparition de la photographie sur le sol japonais, entre le milieu et la fin du XIXème siècle, se dessinent les épidermes recouverts de tatouages des yakuza. Souvent capturés de profil voire de dos pour éviter d’être reconnus, ces hommes affichent avec fierté leurs irezumi, nom japonais donné à ces tatouages qui recouvrent de larges parties du corps de ceux qui les arborent. 

On peut alors observer la multiplicité des motifs, leur gain subtil sur la peau vierge dont la surface s’amenuise au fil du temps. Et ces couleurs, bleu, rouge ou vert, ajoutées sur la photographie après la prise de vue, par des coloristes qui apposent délicatement la peinture sur le cliché, redonnant leurs teintes aux dragons, fleurs ou créatures aux formes humaines. 

 

Des tatouages en signe de ralliement

Ces motifs ne sont pas choisis au hasard, ou uniquement pour leur esthétisme. Les yakuza les sélectionnent en fonction de leur signification : la carpe représente le courage, le dragon la sagesse, le tigre la force, le serpent la guérison… Ces tatouages sont souvent communs à tous les membres d’un même clan, avec un impératif : qu’ils ne soient pas visibles au quotidien. Certaines parties du corps comme les mollets, les poignets, les mains, le cou et le visage restent vierges de tout dessin, les tatouages étant alors dissimulés sous les vêtements.

Ces tatouages traditionnels sont à l’époque réalisés à la main, grâce à la technique du tebori que l’on peut traduire par “gravé à la main”. Le tatoueur marque la peau à l’encre de charbon mélangée à des pigments de couleurs, à l’aide d’un manche en bambou au bout duquel est fixé un faisceau d’aiguilles. Une technique ancestrale qui nécessite des années d’apprentissage et qui est encore perpétuée de nos jours par certains tatoueurs comme Tsuyoshi Honda.

‘The tattooed men of old Japan - 入れ墨’ Early 1870's photograph by Baron von Stillfried.

‘The tattooed runner - Taking a Break on a Cask of Sake 入れ墨’ Early 1870's photograph by Baron von Stillfried.

‘The tattooed men of old japan 入れ墨’, photograph by Baron von Stillfried.

‘Tattooed post runner - Delivering the Mail in Old Japan 入れ墨’ Printed and Published by the Kusakabe Kimbei studio. 1893