Shin Yahiro ausculte la vie à Fukushima
Dans la série “fukushima”, le photographe souligne l'ambivalence d'une ville victime de l'accident nucléaire et dépendante de la centrale.
Ville d’Okuma, Région de Futaba, Préfecture de Fukushima. La décontamination de larges parcelles de terrain afin de permettre le retour des habitants est en cours depuis 2012. Bien que la décontamination d’autres villes et champs soit désormais terminée et que leurs habitants puissent y revenir, la majeure partie de la ville d’Okuma est toujours dans une zone qui rend le retour difficile en 2020. © Shin Yahiro
En mars 2011, le Japon est frappé par un tremblement de terre qui occasionne un tsunami, qui lui-même entraîne un accident nucléaire à la centrale de Fukushima, sur la côte nord-est du pays. Une catastrophe qui a agi comme un détonateur pour le photographe Shin Yahiro. « J’ai honte de dire que je ne m’attendais pas à ce qu’une telle catastrophe se produise au Japon avant l’accident nucléaire. Cela m’a aussi fait réfléchir au fait que je ne pensais pas beaucoup au Japon et aux problèmes de mon pays », confie-t-il à Pen.
Shin Yahiro est un photographe et réalisateur freelance, né en 1979. Spécialisé dans la documentation des problèmes sociaux, des conflits et des catastrophes naturelles, il quitte l’archipel nippon après le 11 septembre 2001 pour voyager à travers le monde et travailler sa photographie, qu’il apprend en autodidacte. Moyen-Orient, Europe, mais aussi Irak, Afghanistan ou encore Tibet, Shin Yahiro multiplie les destinations avant de revenir à Tokyo.
Un miroir de la société japonaise
Il se rend à plusieurs reprises à partir de 2011 dans la préfecture de Fukushima et débute un travail photographique en noir et blanc qui l’amène à capturer l’ambivalence de la métropole. « Lorsque j’ai visité à nouveau la ville récemment, j’ai réalisé que c’était un endroit qui représentait la société japonaise, en particulier les personnes et les communautés impliquées dans la centrale nucléaire, à la fois en bien et en mal. »
Sur les clichés se succèdent tantôt des intérieurs soufflés où le temps semble s’être figé depuis la catastrophe, tantôt des scènes qui trahissent le retour de la vie et des habitudes du quotidien : des adolescentes fardées pour un spectacle ou encore un chauffeur de taxi attendant un client.
Le photographe se rend également dans les villages alentours, où il photographie là encore cette ligne de crête. « Je pense que je recherchais un sentiment d’inconfort que je n’avais pas été capable d’articuler dans mon propre esprit », conclut Shin Yahiro. Le photographe multiplie depuis 2011 les projets relatifs à la catastrophe de Fukushima. Il signe notamment deux autres séries sur ce thème : Tsunami 2011 et To me who was a child at that time.
fukushima (2011-), une série de photographies par Shin Yahiro à retrouver sur son site internet.
Ville de Motomiya, Préfecture de Fukushima. Tsuyoshi Konno, ancien producteur de lait de la ville de Namie, a déménagé son exploitation à Motomiya après l’accident nucléaire. Dans le passé, une de ses vaches avait gagné le premier prix lors d’un concours d’élevage de vaches laitières. © Shin Yahiro
Quartier de Setagaya à Tokyo. Cinquième anniversaire du désastre. Le discours endeuillé de l’Empereur du Japon est diffusé dans tout le pays. © Shin Yahiro
Ville de Namie, Région de Futaba, Préfecture de Fukushima. Un chien erre au travers d’une ville fantôme. Namie est située au sein du périmètre de 20 km autour de la centrale nucléaire et presque tous ses habitants ont dû être évacués à cause de l’accident nucléaire. Le mois suivant l’évacuation, la ville a été désignée comme faisant partie d’une zone à accès restreint. Les chiens abandonnés par leurs propriétaires m’ont toujours suivis. La ville de Namie a levé les restrictions d’accès en 2017 mais le côté montagneux de la ville est toujours en accès limité du fait de hauts niveaux de radiation. © Shin Yahiro
Ville de Tomioka, Région de Futaba, Préfecture de Fukushima. Les habitants évacués contemplent la floraison des cerisiers depuis un bus. La ville de Tomioka est renommée pour ses magnifiques cerisiers. Un évènement d’observation de la floraison des cerisiers a été organisé par la ville. Les résidents évacués ont été invités à venir admirer les cerisiers depuis un bus mais les fleurs n’étaient pas entièrement épanouies et il pleuvait. © Shin Yahiro
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