“Le Pornographe”, au-delà de la chair
Ce long métrage de Shohei Imamura utilise le cadre de la pornographie pour mettre en lumière les contradictions du Japon d’après-guerre.

© Avec l'aimable autorisation de Elephant Films
Davantage que sur le titre principal, Le pornographe, c’est sur le sous-titre, Introduction à l’anthropologie, qu’il faut s’appesantir pour comprendre ce qui se joue dans ce film de Shohei Imamura. Car durant les 120 minutes de ce long métrage, adaptation du roman éponyme de Akiyuki Nosaka publié trois ans plus tôt, le spectateur ne verra quasiment pas la moindre peau se dévoiler.
Monsieur Ogata, principal protagoniste, est un représentant de commerce en instruments médicaux, qui arrondit ses fins de mois en tournant des films érotiques qu’il distribue sous le manteau. Mais très vite, sa petite entreprise prend de l’ampleur et il répond à de plus en plus de commandes de clients fortunés, ce qui ne manque pas d’attirer l’attention des yakuza.
Dénoncer la corruption japonaise
Le film possède un côté loufoque. Monsieur Ogata vit avec Haru, une veuve convaincue que son mari s’est réincarné au sein de la carpe vivant dans l’aquarium qui trône au milieu du salon. Le comique n’efface pourtant pas la part plus sombre du récit qui se dévoile au fur et à mesure que l’activité lucrative du héros dégénère en mises en scène d’inceste, de pédophilie et de prostitution.
Shohei Imamura livre ici un film à tiroirs. Car derrière l’intrigue qui se joue dans les bas fonds d’Osaka, c’est toute la corruption de la société japonaise de l’après-guerre que le cinéaste, deux fois récompensé d’une Palme d’or pour La Ballade de Narayama (1983) et L’Anguille (1997), entend mettre au jour.
Le Pornographe montre avec force détails l’humain, la cellule familiale traditionnelle et les normes qui peuvent se révéler être un carcan. En filmant la marginalité, la sexualité, la perversité et la criminalité, Shohei Imamura questionne les dérives que peut, selon lui, encourager l’aisance matérielle retrouvée après des années de guerre. Avec une question : qui du héros ou de la société est le plus corrompu ?
Le Pornographe (1966), un film réalisé par Shohei Imamura édité en coffret DVD et Blu-Ray par Elephant Films.

© Avec l'aimable autorisation de Elephant Films

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