Voyage sur les traces du saké avec Florent Chavouet
Avec “Touiller le miso”, le dessinateur français renoue avec ses carnets de voyage colorés, agrémentés cette fois-ci de haiku.
© Florent Chavouet
Après un détour par le polar avec Petites coupures à Shioguni, le dessinateur Florent Chavouet retrouve les carnets de route japonais avec un nouveau prisme cette fois, celui du sake. Reprenant peu ou prou les mêmes ressorts que dans Tokyo Sanpo et Manabe Shima, Touiller le miso est un recueil de cartes géographiques, d’anecdotes de voyage et de décryptages plus que pointus du moindre lieu croisé. La nouveauté, c’est que Florent Chavouet s’est essayé aux haiku, des petits poèmes extrêmement brefs, qui ponctuent chaque double page de l’album et qu’il a également publié quotidiennement pendant son séjour sur son compte Instagram.
Il a tout de même pris la liberté de s’extraire des contraintes de saisonnalité de cette forme poétique. « Des amis Japonais m’ont appris que ce sont en réalité des senryu, des poèmes aux mêmes contraintes de syllabes que les haiku, mais sans l’exigence saisonnière », détaille le dessinateur dans une interview à Pen.
Passer le seuil des kaku-ushi
L’idée des haiku vient à l’esprit de Florent Chavouet alors qu’il se trouve dans l’avion qui le mène à Tokyo, encore très incertain de la tournure que va prendre son voyage. S’il sait qui l’a invité, Ino San qui a entendu parler de lui après que le Français soit passé à la télévision nippone pour raconter son aventure à Manabe-shima, Florent Chavouet sait un peu moins comment vont s’organiser les semaines à venir. « Le but était de me faire découvrir le sake, en me faisant rencontrer des producteurs, des vendeurs, mais aussi visiter des kaku-ushi, ces petits établissements qui vendent de l’alcool mais qui font aussi office de bar, bien souvent tenus par des petits vieux. »
Sauf qu’une fois sur place, le parcours n’a pas manqué de circonvolutions. « C’était un peu le flou artistique, on a parfois vu des choses qui n’avaient rien à voir avec le sake », s’amuse le dessinateur. « Les haiku étaient pour moi un très bon moyen de structurer tout ça. »
En état d’alerte visuelle
On suit donc le parcours de Florent Chavouet et de ses acolytes à Tokyo puis sur la route du Tokaido, à la découverte de l’alcool emblématique japonais, qui se dessine au fil des pages sous les crayons de couleur et l’encre aquarellable du dessinateur. Aux pages didactiques où l’on apprend quelques subtilités sur l’alcool de riz, répondent des croquis de ce qui a attiré l’oeil averti de Florent Chavouet. Pour cet ouvrage, il a passé un mois et demi dans l’archipel, interrompu par un aller-retour à Strasbourg le temps de quelques semaines, avant de découvrir Hokkaido et la rudesse de son hiver.
Formes étranges des maisons, poésie du clair-obscur des vitres en verre dépoli, jeux pour enfants ou bouilloire éclairant la nuit de sa lumière bleue, tout est sujet à poésie sous les traits précis de celui qui s’envisage encore comme un touriste au Japon. « Je ne vis pas au Japon donc j’arrive encore à être surpris par les gens, par des situations, par des détails visuels. Je suis beaucoup plus en alerte visuelle que je ne peux l’être en France », conclut Florent Chavouet.
Un état d’alerte qui permet au dessinateur de poursuivre son exploration nippone, sans pour autant tomber dans la répétition. Touiller le miso oriente les lecteurs vers des détails qui auraient très bien pu rester dans l’anonymat du quotidien.
Touiller le miso (2020), un livre illustré par Florent Chavouet, publié aux éditions Picquier.
© Florent Chavouet
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© Florent Chavouet
© Florent Chavouet
© Florent Chavouet
© Éditions Picquier
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