Entre Renaissance, Pop Art et Anime, le grand bond technologique
L’artiste Hiroshi Mori associe l'irréconciliable : la planéité des peintures Rinpa et l'émerveillement propre aux livres pour enfants.

“The End” (2014)
« Je ne tente pas de devenir un professionnel de l’animation ou un dessinateur de bandes dessinées, ni un maître de la peinture réaliste. » Que veut donc faire Hiroshi Mori ? « Peut-être que ce que je veux, c’est devenir quelqu’un qui se situe dans une zone grise, qui est capable de se moquer des gens des deux côtés, comme lorsque j’étais jeune, et qu’à l’école nous ajoutions d’épais sourcils aux affiches de politiciens », explique l’artiste sur son site. Car, si au premier regard on pourrait voir dans son œuvre, à la manière de ce que fait un autre artiste japonais, Madsaki, un détournement d’œuvres célèbres, la démarche et l’intention d’Hiroshi Mori sont différentes. Il ne réinterprète pas, il concilie.
Né en 1977 et passé par la Tokai University, Hiroshi Mori occupe divers emplois avant de se tourner vers les arts visuels et de rejoindre la National University of Arts de Tokyo, dont il est diplômé en 2013. Aujourd’hui, son travail est à la fois inspiré par les œuvres classiques et religieuses de l’art occidental, de l’art traditionnel japonais et de l’école Rinpa, mais également par la culture anime et manga, tout en accordant une place centrale aux nouvelles technologies.
À l’humour, à la vie
De Leonard de Vinci à Roy Lichtenstein en passant par Ito Jakuchu — et sa planéité caractéristique de la peinture traditionnelle japonaise — et Monet, les références au sein desquelles Hiroshi Mori a puisé son inspiration sont diverses. Quant à la présence marquée de la religion dans son travail, l’artiste explique dans un entretien avec Hong Kong Tatler : « lors du tsunami et du tremblement de terre à Fukushima en 2011, plus de 15 000 Japonais sont morts. J’ai été profondément influencé par l’événement et un ami m’a suggéré de lire la Bible. Le Livre de Job… m’a inspiré et m’a conduit à décider de combiner l’iconographie religieuse avec les nouvelles technologies. »
Car, si l’inspiration est visible et assumée, et la « maladresse » revendiquée, l’originalité vient des matériaux et techniques employés. Celui qui a, après son premier cursus universitaire, travaillé en tant que peintre dans l’automobile utilise par exemple aujourd’hui sa maîtrise de l’aérosol pour imiter la peinture à la feuille d’or. Ses œuvres intègrent également une combinaison d’acrylique, d’uréthane, de placage miroir argenté et de résine durcie aux UV sur aluminium.
Cette technique et cette volonté donnent naissance à une diversité d’œuvres, revisitées avec les codes actuels, ceux de la jeunesse. Concernant son rapport au public, et sa réaction face à ces “parodies”, l’artiste justifie : « Je pense que la partie la plus amusante et la plus importante de l’œuvre est l’alchimie qu’elle suscite chez le spectateur, qu’il s’agisse de sympathie ou d’antipathie ».
Hiroshi Mori résume ainsi ses intentions : « Dans mon quotidien, je cherche une manière de joindre l’inconciliable : les surfaces planes des peintures Rinpa et l’émerveillement des livres pour enfants. »
Plus d’informations sur le travail d’Hiroshi Mori sur son site internet.

“Untitled #8” (2019)

“Sleeping Girl” (2017)

“Sunflower” (2018)

“Albert Einstein x Andy Warhol x Famicom#1” (2020)

“Jeanne d'arc” (2014)
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