“La parade nocturne des 100 démons”, les monstres dans la ville
Ces estampes sont signées Kyosai Kawanabe, artiste protéiforme qui s'est inspiré des légendes effrayantes japonaises.

© Kyosai Kawanabe / Public Domain
Soldats squelettes, instruments rituels bouddhistes transformés en monstres, dragons ou encore bestiaire fantastique, nombreux sont les yokai, ces démons du folklore nippon, à parader sur ces estampes, composant La parade nocturne des 100 démons, dite Hyakki Yako en japonais. Une création sortie tout droit de l’imagination de Kyosai Kawanabe en 1890, décrite par le Metropolitan Museum of Art (MET) de New York, comme « une encyclopédie visuelle spectaculaire des créatures surnaturelles du folklore du Japon prémoderne. »
Kyosai Kawanabe naît en 1831 dans la ville de Koga, au nord de Tokyo. Fils de samouraï, il débute l’apprentissage de l’art à l’âge de sept ans, dans l’atelier de Kuniyoshi Utagawa, maître d’ukiyo-e, avec une préférence pour les croquis sur modèle. Dès ses onze ans, il fait ses classes à l’école Kano, après de Towa Maemura, qui l’affuble du surnom de « démon de la peinture ». Une école de laquelle il s’éloignera peu à peu, préférant à son style classique la liberté de l’art populaire, glissant vers un style comique et satirique. Kyosai Kawanabe est également connu pour être le premier caricaturiste du Japon, utilisant cet art pour affirmer son engagement à la liberté d’expression, ce qui lui vaudra plusieurs arrestations par le shogunat. Il est également l’un des premiers auteurs du magazine de manga de l’Histoire, Eshunbun Nipponchi, qui n’a vécu que le temps de trois numéros.
De l’ère Edo au Studio Ghibli
Son œuvre, La parade nocturne des 100 démons, s’inspire de la croyance selon laquelle, chaque année, les yokai investissent les rues et ruelles des villages les soirs d’été, obligeant les habitants à se calfeutrer chez eux. Les premières illustrations de la série, compilées dans un livre sur bois, sont d’ailleurs dédiées à ces habitants. On les voit dans un premier temps rassemblés autour d’un feu, pour écouter vraisemblablement des histoires de fantômes, puis un calligraphe pose sa plume sur la lampe à huile afin de plonger la maison dans l’obscurité, avant que les démons ne fassent leur apparition.
Les oeuvres de Kyosai Kawanabe, qui a vécu à la fois les ères Edo et Meiji, en faisant un observateur pointu du passage de la société japonaise du féodalisme à la modernité, sont exposées notamment au British Museum de Londres ou encore au musée Guimet à Paris. La parade nocturne des 100 démons continue d’irriguer la culture populaire nippone. En témoigne Pompoko, le film d’animation du Studio Ghibli où la parade nocturne, ne rassemblant ici que des tanuki, est portée à l’écran.
Certaines oeuvres de Kyosai Kawanabe sont à retrouver sur le site internet du British Museum.

© Kyosai Kawanabe / Public Domain

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