Schizophrénie et témoignage photographique d’un passé envolé
Publié en 2016 par le photographe Takahiro Kaneyama, “While Leaves Are Falling” aborde un drame familial avec recul et humour.
“My Mother in a Hotel Room in Hakone”, 2019 © Takahiro Kaneyama
La photographie, outil de thérapie familiale. Dans While Leaves Are Falling (2016), Takahiro Kaneyama immortalise sa mère, et son évolution. Cette dernière, diagnostiquée schizophrène lorsque son fils était adolescent — une pathologie qui nécessite des séjours réguliers à l’hôpital —, n’étant plus en mesure de prendre en charge son éducation, sa grand-mère et deux tantes ont pris le relais.
Né en 1971 à Tokyo, Takahiro Kaneyama a étudié le film et la photographie au City College of New York, avant de se concentrer sur la photographie documentaire au International Center of Photography, toujours à New York. Ses travaux sont aujourd’hui régulièrement diffusés dans la presse, dont le New York Times Magazine, et exposés dans des institutions telles que le Tokyo Photographic Art Museum.
Aller-retours dans le temps et l’espace
Installé à l’étranger, l’artiste fait des allées et venues au Japon. Après le décès de sa grand-mère, il décide de se consacrer à un travail documentaire aux diverses motivations. Dans un premier temps, afin de montrer à sa mère qui elle était avant de tomber malade, il la met face à son environnement, censé lui être familier. Ces clichés décrivent une personnalité atteinte, dont l’attitude face à l’objectif dégage une forme de mépris. Elle apparaît sous des jours très différents : avant d’être malade, maquillée ou non, avec des coiffures diverses et une corpulence variable, au fil de l’évolution des traitements. Ce corps changeant, ces hauts et ces bas sont reliés par un regard et une expression persistante. Takahiro Kaneyama adopte une démarche sensible, subtile, où la dimension tragique de cette réalité est acceptée avec un peu de recul, d’humour.
Ce travail, en équilibre entre intimité et distance, résonne comme une confession personnelle et une réflexion sur les thèmes universels de l’amour, de la famille, de la dépression et du temps. Un documentaire photographique et autobiographique.
L’œuvre de Takahiro Kaneyama a régulièrement pour cadre sa propre histoire, avec son entourage comme figurants. C’est ainsi le cas de son ouvrage Shumafura, dans lequel le photographe part à la recherche de son arrière-oncle, qu’il rencontre pour la première fois dans un village de pêcheurs situé sur la Péninsule de Shimokita.
While Leaves Are Falling (2016), un livre de photographies de Takahiro Kaneyama publié par la maison d’édition AKAAKA.
“My Family at My Mother's Hospital“, 1999 © Takahiro Kaneyama
“My Mother in a Hotel Room”, Kyoto, 2010 © Takahiro Kaneyama
“My Mother in Bed”, 1999 © Takahiro Kaneyama
“My Family in Nikko”, 2001 © Takahiro Kaneyama
“My Family in Hakone”, 2009 © Takahiro Kaneyama
“My Mother in an Isolation Room at Her Hospital 2”, 2016 © Takahiro Kaneyama
LES PLUS POPULAIRES
-
“Les herbes sauvages”, célébrer la nature en cuisine
Dans ce livre, le chef étoilé Hisao Nakahigashi revient sur ses souvenirs d’enfance, ses réflexions sur l’art de la cuisine et ses recettes.
-
Shunga, un art érotique admiré puis prohibé
Éminemment inventives, se distinguant par une sexualité libérée, ces estampes de la période Edo saisissent des moments d'intimité sur le vif.
-
Le périple enneigé d’un enfant parti retrouver son père
Le film muet “Takara, la nuit où j'ai nagé” suit un jeune garçon sur la route, seul dans un monde d'adultes qu'il a du mal à appréhender.
-
L'homme qui construisait des maisons dans les arbres
Takashi Kobayashi conçoit des cabanes aux formes multiples adaptées à leur environnement et avec un impact limité sur la nature.
-
Les illustrations calligraphiques d'Iñigo Gutierrez
Inspiré du “shodo”, la calligraphie japonaise, l'artiste espagnol établi à Tokyo retranscrit une certaine nostalgie au travers de ses oeuvres.