Le requiem graphique de Seiichi Hayashi
Le roman graphique sentimental “Élégie en rouge” est l'œuvre d'un créateur avant-gardiste du manga underground et du pop art japonais.

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010
Initialement publiée dans l’anthologie du manga alternatif Garo en 1971, la bande dessinée minimaliste d’avant-garde Élégie en rouge de Seiichi Hayashi voit chaque espace vide devenir une réserve à émotions.
De simples traits et un graphisme minimaliste dépeignent le difficile quotidien d’un jeune couple et ce, à travers des instants figés, miroirs d’une angoisse existentielle. Influencé par des fragments de la propre vie de l’artiste, la manière dont ce récit — celui d’un artiste manga en difficulté et de sa vie amoureuse compliquée — est raconté a eu un impact sur tout l’univers du manga.
Représentation par l’absence
Notamment célébré pour l’extrême singularité de son art abstrait, Seiichi Hayashi — né en Mandchourie en 1945 et précurseur du gekiga (manga graveleux destiné aux adultes) — a eu une influence majeure sur le graphisme japonais. Artiste prolifique — animateur et illustrateur, également réalisateur et auteur de livres pour enfants — son travail consacre une période, à la fin des années 1960 et au début des années 1970, où le manga est devenu une forme d’expression respectée au sein du monde de l’art.
Si son chef-d’œuvre Élégie en rouge a été publié il y a plus de 50 ans, dans une période de turbulences culturelles et politiques, la magie surréaliste de chacune de ses cases est toujours aussi stimulante pour le lecteur contemporain. Son style de découpage possède une sensibilité pop comparable à celle de la Nouvelle Vague et une énergie similaire à celle des fanzines punk ; mais sa finesse moderne et son esthétique japonaise sobre renvoient une délicate élégance. L’encre sombre qui compose ses figures mélancoliques et ses scènes où la nature est absente dessinent des mondes intérieurs indescriptibles.
Élégie en rouge est une œuvre sublime, créée avec une substance magique située entre tradition et modernité, entre le tangible et l’abstrait. Ses pages les plus clairsemées recèlent, dans leurs quelques coups de pinceau, une puissante intensité émotionnelle.
Élégie en rouge (2010), un manga de Seiichi Hayashi édité en français par les éditions Cornélius.

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010

“Élégie en rouge” © Seiichi Hayashi / Cornélius 2010
LES PLUS POPULAIRES
-
Araki nous explique lui-même ses chefs-d’œuvre qui ont marqué l’histoire
Le photographe japonais Nobuyoshi Araki prend des photos depuis plus d'un demi-siècle, abordant sans cesse de nouveaux thèmes et techniques.
-
“Buto”, la danse des ténèbres révolutionnaire
Né dans un contexte d’après-guerre rythmé par des mouvements contestataires, cet art subversif rejette les codes artistiques traditionnels.
-
Les hommes de bois de Nagato Iwasaki
Dans sa série “Torso”, l'artiste sculpte des statues d’hommes et femmes à partir de bois flotté, qu’il place ensuite dans la nature.
-
Namio Harukawa, maître du dessin SM
“Garden of Domina” offre une plongée dans l’univers d'une icône de l'“oshiri”, dont l’œuvre a aujourd’hui atteint le monde entier.
-
Ryo Fukui — Redécouverte d’une légende du jazz japonais
La discographie du pianiste a été rééditée à la demande du public, illustrant un regain d'intérêt pour ce genre musical au sein de l'archipel.



