Mamiko Watanabe, jazz contemporain déterminé
La pianiste déploie un jeu lumineux sur “Being Guided by the Light” avec le batteur de légende Billy Hart et Santi Debriano à la contrebasse.

“Being Guided by the Light”, Mamiko Watanabe © Dan Balilty, Jojo Records
L’album s’ouvre par un accord de piano affirmé, le ton est donné. Dans Being Guided by the Light, son cinquième album paru en 2024 chez Jojo Records, la pianiste Mamiko Watanabe révèle sa versatilité entre swing, latin jazz et musique expérimentale. Entourée des vétérans Billy Hart à la batterie, ayant joué entre autres avec Herbie Hancock et Stan Getz, et Santi Debriano à la contrebasse, ancien accompagnateur d’Archie Shepp, la pianiste impose sa marque de fabrique. Un jazz moderne et contemporain qui ne renie pas la tradition.
Mamiko Watanabe grandit à Fukuoka où elle apprend le piano dès l’âge de quatre ans, alors que sa mère l’initie au jazz (bien qu’elle ne soit pas elle-même musicienne professionnelle, elle a toujours encouragé sa fille). Elle poursuit ensuite ses études avec une bourse au prestigieux Berklee College of Music à Boston, marchant dans les pas de Toshiko Akiyoshi, pianiste et cheffe d’orchestre repérée par Oscar Peterson, première citoyenne japonaise à y faire ses classes. Au début des années 2000, toujours étudiante, Mamiko Watanabe aura l’occasion de jouer notamment avec Joe Lovano ou Bobby McFerrin. Elle enregistrera son premier disque à son nom, One After Another, en 2005 suivi de quatre autres, dont le remarqué Mother Earth en 2010.
Une recherche perpétuelle de nouvelle lumière
Being Guided by the Light s’ouvre avec le morceau titre, composé par la pianiste lors de la pandémie de COVID-19. « J’essayais de composer tous les jours pour tenir », se souvient Mamiko Watanabe dans une interview à Pen. « C’était une période difficile mais riche musicalement. Je ne savais pas si j’allais un jour pouvoir jouer ces morceaux en public. Aujourd’hui je suis très reconnaissante de pouvoir enfin les partager ».
Ce morceau témoigne de sa détermination à améliorer sa technique, et se caractérise par une certaine retenue du jeu et des variations d’intensité. A l’opposé d’“Atomic Space”, autre composition de la pianiste, à l’atmosphère mystique et aux harmonies presque dissonantes, reflet de la spiritualité qui imprègne ce projet. « Ma recherche et mon développement musical sont une recherche perpétuelle de nouvelle lumière », explique Mamiko Watanabe qui puise son inspiration dans le jeu de pianistes comme Bill Evans, Art Tatum ou Thelonious Monk. Ou encore dans ses lointains souvenirs, avec l’ajout de la ballade “My Grandfather’s Clock” popularisée au Japon dans l’émission musicale pour enfants Minna no Uta de la chaîne NHK.
Enregistré en deux jours après seulement deux répétitions, Being Guided by the Light témoigne de la coordination du trio et de la fluidité de ses interactions. Collaboratrice de longue date de Santi Debriano, Mamiko Watanabe y a inclus “Nigeria”, une de ses compositions, sur les conseils de son producteur Simon Belelty, aussi directeur du label Jojo Records. Un morceau de McCoy Tyner, auquel le contrebassiste a comparé la pianiste, a aussi été retenu en clôture d’album. Une manière pour la pianiste d’assumer cette filiation alors qu’elle souhaite continuer d’élargir l’horizon de son jazz en y apportant de nouvelles sonorités, pourquoi pas funk ou électriques.
Being Guided by the Light (2024), un disque de la pianiste Mamiko Watanabe édité par Jojo Records.

Billy Hart © Dan Balilty, Jojo Records

Santi Debriano © Dan Balilty, Jojo Records

Mamiko Watanabe © Dan Balilty, Jojo Records
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