Les collages surréalistes de Toshiko Okanoue

A partir d'images tirées de magazines de mode occidentaux, l'artiste développe son style défiant toutes proportions.

31.08.2019

TexteManon Baeza

“Premonition” © Toshiko Okanoue, Collection of the Museum of Art, Kochi

Née en 1928 à Kochi, l’artiste japonaise Toshiko Okanoue fait ses armes au sein de l’école Bunka Gakuin à Tokyo. Alors qu’elle étudie le design de mode, elle se prend très vite de passion pour le collage. Un art à part entière, qui lui vaut aujourd’hui une renommée internationale.

Dans l’après-guerre, aux débuts des années 1950, l’artiste s’échappe de l’atmosphère pesante et morose en parcourant les magazines de mode occidentaux à l’instar de Vogue, Harper’s Bazaar ou encore Life. Instinctivement, elle s’amuse à découper, regrouper puis recoller des fragments de corps et d’objets en tous genres, qu’elle choisit minutieusement.

 

Une icône du surréalisme japonais

Son art révèle un jeu avec les proportions déroutant qui déséquilibre totalement ses œuvres, mettant en lumière des corps asymétriques s’entrechoquant avec des animaux et divers objets. C’est donc sans vraiment le savoir que Toshiko Okanoue met un pied dans le mouvement du surréalisme.

Généralement, les tableaux surréalistes traduisent un rêve de manière figurative, rompant catégoriquement avec un conformisme prôné par la société contemporaine. Le surréalisme vise à libérer l’artiste du contrôle de la raison, l’invitant à composer son œuvre de façon imprévisible. Si, à cette époque, Toshiko Okanoue n’a aucune idée de l’existence du mouvement surréaliste, aujourd’hui pourtant, elle est au Japon l’une des figures de proue de ce courant.

 

Un travail resté près de 40 ans dans l’ombre

Ce n’est qu’en 1952, lorsqu’elle rencontre l’artiste et poète Shuzo Takiguchi que sa carrière prend tout son sens. Ce dernier était une figure emblématique du mouvement surréaliste au Japon, et l’a éduquée en lui présentant, entre autres, l’œuvre de Max Ernst, qui a eu une influence décisive sur son art. Durant six ans, Toshiko Okanoue est très prolifique, avec plus d’une centaine de pièces à son actif. Ses collages oniriques juxtaposent des images contradictoires et visent à créer son propre vocabulaire.

L’artiste organise sa première exposition en 1953, mais son divorce en 1957 met un terme radical à sa carrière. Il faudra attendre près de 40 ans avant que son travail ne sorte de l’ombre. C’est le conservateur du musée métropolitain de la photographie de Tokyo qui, au cours des années 1990, découvre les collages uniques de Toshiko Okanoue et propulse sa carrière par la même occasion. Depuis, son travail a été reconnu pour sa contribution précieuse à l’avant-garde japonaise et les musées (dont le MoMa, à New York) se sont saisis de son oeuvre en l’exposant aux quatre coins du monde.

Photo Collage, The Miracle of Silence (2019), un livre de collages par Toshiko Okanoue publié par Seigensha.

“The Complete Works of Okanoue Toshiko” / Layout: B5 size, hardback, 192 pages. / Expected price: 5000JPY, plus tax. / Publication: January, 2018 / Enquiries: Kawade Shobo Shinsha

“A Long Journey” © Toshiko Okanoue, Collection of the Museum of Art, Kochi