“Odo Yakuza Tokyo”, dans le cercle restreint de mafieux tokyoïtes
Le photographe belge Anton Kusters a eu un accès privilégié aux évènements routiniers d'un clan de yakuza dirigé par un certain Souichirou.

© Anton Kusters
L’ouvrage Odo Yakuza Tokyo d’Anton Kusters, plonge le lecteur dans le quotidien de ceux considérés comme les membres les plus redoutés de la société japonaise. Le photographe, qui vit entre la Belgique et Tokyo, s’est intéressé à ce sujet après avoir croisé des yakuza à de nombreuses reprises dans les rues ou dans les bars de la capitale japonaise où son frère est installé. Intrigué, et surtout conscient de n’en savoir que très peu sur eux, Anton Kusters décide, en 2009, de débuter un travail photographique qui leur est consacré.
Il prend alors contact, par le biais d’un fixeur, avec un des patrons d’un clan yakuza, Souichirou. S’en suivent dix mois de négociations afin de pouvoir créer une série que le photographe imagine davantage comme une oeuvre documentaire, prolongée ensuite d’une exposition et d’un livre, que comme un travail de photojournalisme.
« Au cours de ces réunions, j’ai parlé de mes intentions de regarder, d’écouter et d’essayer de comprendre la culture japonaise, et par extension le yakuza, sans jugement préalable », nous explique Anton Kusters, qui finit par voir sa proposition acceptée. « Je pense qu’ils m’ont laissé photographier parce que j’ai exposé clairement mes intentions et probablement aussi parce qu’en tant qu’étranger je verrais les choses d’une manière différente. »
Un travail jamais censuré
Les yakuza préviennent le photographe à chaque fois qu’ils se rassemblent : lors de réunions privées dans des onsen, pour des funérailles ou encore des camps d’entraînement secrets. Il peut alors rester à leurs côtés 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Anton Kusters documente ces instants autant que possible. « Tout le monde a presque immédiatement oublié que j’étais là et, tant que je n’intervenais pas socialement, je pouvais tout photographier. »
Sur proposition du photographe et afin de construire une relation de confiance, chaque cliché est ensuite scruté par le clan qui pouvait, sans se justifier, opposer un droit de véto et demander la suppression des images. Ce qui n’est jamais arrivé, même si sur certaines, des membres sont tout à fait reconnaissables. « Pour les yakuza, il est très important d’être perçu comme un membre éminent de la société. Ils n’aiment pas donner l’impression de vouloir se cacher, voilà pourquoi ils se montrent ouvertement dans la rue », explique le photographe.
Dès qu’il séjourne dans l’archipel, Anton Kusters a un nouveau rituel : aller voir Souichirou. « Cela me permet de lui rendre hommage et de lui faire savoir que je suis là. Nous prenons une bière et parlons de la vie pendant un court laps de temps, puis nous reprenons chacun notre quotidien. »
Odo Yakuza Tokyo (2011), un livre de photographies par Anton Kusters autopublié chez Zabrozas.

© Anton Kusters

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