“Bonjour”, le conflit générationnel par Yasujiro Ozu
Le cinéaste décortique le quotidien d’un quartier de banlieue, traitant les travers du monde adulte de manière satirique à hauteur d'enfant.
© 1959 / 2013 Shochiku Co., Ltd.
Deuxième film en couleur de Yasujiro Ozu, Bonjour prolonge les réflexions chères au réalisateur sur les conventions sociales et les conflits générationnels. Grâce à une mise en scène épurée, il s’amuse à décortiquer le quotidien d’un quartier de banlieue, en suivant les péripéties de deux jeunes garçons. C’est l’un des films les plus joyeux du cinéaste, qui démontre une fois encore l’étendue de son talent en atteignant l’équilibre parfait entre minimalisme, humour et observation minutieuse du quotidien.
Yasujiro Ozu (1903-1963) est l’un des grands maîtres du cinéma japonais. D’abord assistant-réalisateur, il devient l’un des réalisateurs les plus célèbres du Japon dans les années 1930. Son œuvre, longtemps méconnue en Occident, se démarque par une universalité qui dépasse les particularismes culturels, abordant dans des chefs-d’œuvre comme Voyage à Tokyo ou Le Goût du saké, les rapports entre la société et l’individu, entre l’individu et la famille, et les relations entre générations.
Un film à la fois drôle et touchant
Bonjour est un remake d’un autre film de Yasujiro Ozu réalisé en 1932, Gosses de Tokyo. Bien que certains éléments scénaristiques soient repris de ce dernier, le film raconte une histoire plus contemporaine, sous la forme d’une satire du consumérisme dans le Japon d’après-guerre. Dans une ville de la banlieue de Tokyo, une bande de jeunes garçons passe son temps à regarder la télévision chez un voisin jugé trop excentrique. Les petits Minaru et Isamu pressent leurs parents pour avoir leur propre poste de télévision, en vain. Les deux jeunes garçons décident alors de faire une grève de la parole, en protestation à l’hypocrisie des adultes. Yasujiro Ozu compose un portrait de famille aussi riche que ceux de ses films dramatiques, tisse une multitude de gags subtils et se moque des travers du monde adulte en adoptant le point de vue des enfants protagonistes. Le film est à la fois drôle et touchant, et emblématique du versant comique du cinéaste.
Yasujiro Ozu jouit d’une œuvre unanimement considérée par la critique et les cinéphiles comme indispensable, à l’instar du réalisateur iranien Abbas Kiarostami qui décrit le cinéaste en ces termes : « Le cinéma de Yasujiro Ozu est un cinéma bienveillant. Dans tous ses films, il accorde de l’importance aux interactions, aux relations vraies, à l’homme vrai. ». Bonjour fait partie de ces oeuvres, et bien qu’étant un cinéma bienveillant, Bonjour est un film d’une facture exquise et probablement l’exemple le plus accessible de l’œuvre du réalisateur pour un public occidental.
Bonjour (1959), un film réalisé par Yasujiro Ozu et distribué par Carlotta Films.
© 1959 / 2013 Shochiku Co., Ltd.
© 1959 / 2013 Shochiku Co., Ltd.
© 1959 / 2013 Shochiku Co., Ltd.
LES PLUS POPULAIRES
-
“Buto”, la danse des ténèbres révolutionnaire
Né dans un contexte d’après-guerre rythmé par des mouvements contestataires, cet art subversif rejette les codes artistiques traditionnels.
-
La tradition des œufs noirs du volcan de Hakone
Dans la vallée volcanique de Owakudani, de curieux œufs noirs aux vertus bienfaisantes sont cuits dans les eaux sulfuriques.
-
Maquereau grillé façon kabayaki par Tim Anderson
Le chef américain revisite les traditionnelles anguilles kabayaki japonaises en faisant varier l'ingrédient principal.
-
Jinbocho, le quartier des libraires de Tokyo
Les environs de Chiyoda-ku sont réputés pour leurs librairies d'occasion, maisons d'édition et autres curieux antiquaires.
-
Les plats alléchants des films du Studio Ghibli sont bien plus que des détails
La nourriture, souvent inspirée de recettes appréciées des réalisateurs, est un élément majeur de l'intrigue de ces films d'animation.