Les “sento” et saunas les plus en vogues à Tokyo

La culture des bains est toujours vivace à la capitale où bains publics et saunas pensés par des architectes de renom ne cessent d'ouvrir.

10.10.2024

TexteTakuo Watanabe PhotographiesKohei Omachi

Shibuya SAUNAS

Les sento font partie intégrante de la culture tokyoïte. Espaces de sociabilité importants à l’époque Edo (1603-1868), ces bains publics sont désormais investis par les designers et connaissent un regain de popularité. Tout comme les saunas, dont le nombre ne cesse d’augmenter dans la capitale avec l’apparition de nouveaux espaces innovants.

Bien que la culture des bains soit profondément enracinée dans l’histoire du Japon, c’est au début de l’époque Edo que les sento, ces bains publics accessibles moyennant une modique somme, ont vu le jour. Rares étaient alors les foyers équipés de salles de bain, rendant la présence des sento essentielle. Au fil du temps, leur nombre a connu un pic, passant d’environ 600 établissements à la fin de l’époque Edo à 2 600 dans les années 1960. En 2022, il n’en restait que 462, une baisse due à l’essor des salles de bain et à l’évolution des modes de vie. Pourtant, de nombreux sento à Tokyo ont su évoluer en alliant tradition et design moderne, préservant ainsi l’essence de cette culture.

En parallèle, les saunas connaissent une popularité grandissante dans la capitale. Ce qui n’est pas étonnant puisque certains sento de l’époque Edo étaient en réalité des bains de vapeur appelés mushi-buro, s’apparentant à des saunas. Les habitants d’Edo avaient donc déjà une certaine affinité pour ces bains de vapeur. Aujourd’hui, l’évolution des saunas à Tokyo se caractérise par une rationalisation de leurs espaces, doublée d’une quête d’intimité, de nombreux établissements proposant désormais des salles privées.

Koganeyu (quartier de Kinshicho)

“Sento” de quartier bien ancré dans la communauté locale, Koganeyu attire de nombreux habitués de longue date et de plus en plus de jeunes visiteurs.

Un “sento” de designers à l’origine d’une nouvelle tendance

Fondé en 1932, le sento Koganeyu a été rénové en 2020 sous la direction artistique de Hiroko Takahashi, avec un intérieur conçu par Schemata Architects. Le sento est désormais orné d’une fresque du mont Fuji réalisée par l’artiste Yoriko Hoshi, faisant de ce lieu l’un des pionniers des sento au design de pointe.

Conçu pour être un « sento glocal et favoriser la joie », il séduit non seulement pour ses bains et saunas, mais aussi pour le bar Bandai (du nom du petit espace de réception à l’entrée des bains où se tient l’agent d’accueil du sento), avec son DJ et ses bières artisanales. À la fois établissement de bains et lieu festif, Koganeyu a participé à redéfinir le sento en tant qu’espace de détente et de culture.

Un espace de baignade spacieux et ouvert. En plus des classiques bains chauds, à température modérée ou à remous, un bain médicinal à rotation quotidienne est particulièrement populaire.

Komaeyu (quartier de Komae)

Le comptoir est situé dans un espace ouvert. Une représentation classique du mont Fuji en mosaïque de carreaux accueille les visiteurs dès l'entrée.

Une nouvelle approche du “sento” en tant qu'espace culturel

Après près de 70 ans d’existence, Komaeyu a été rénové en 2023 par Schemata Architects pour devenir un lieu dédié à la découverte de la culture des sento. La designer Rikako Nagashima en a habillé les murs ou les casiers, détournant habilement les joints du carrelage pour créer des motifs.

Le bandai y est prolongé d’un long comptoir où sont servis repas et bières artisanales. Des marchés mensuels y sont également organisés, faisant de Komaeyu un espace communautaire local essentiel, à l’atmosphère unique.

La typographie des casiers a été réalisée par Rikako Nagashima.

Shibuya SAUNAS (quartier de Shibuya)

Immersion comme en forêt dans l'espace de détente baigné de lumière.

Un sauna de qualité supérieure, conçu dans les moindres détails

L’engouement actuel pour les saunas au Japon a suivi le succès en 2019 de l’adaptation télévisée du manga Sado, créé à l’origine par Katsuki Tanaka, dans lequel trois personnages partagent leurs expériences dans un sauna. Lorsqu’ils se reposent après être entrés dans le bain de vapeur et avoir pris un bain froid, les protagonistes laissent échapper le mot totonotta qui signifie « ajusté » ou « enfin à l’équilibre », faisant référence à un état de détente et d’harmonie entre le corps et l’esprit. Cette expression s’est répandue dans le langage usuel et est désormais indissociable de la culture du sauna.

Le mangaka Tanaka Katsuki a justement supervisé la création de Shibuya SAUNAS, un espace placé sous le signe du verbe totonou et dédié à la relaxation ultime. Son intérieur minimaliste est pensé pour réduire les distractions visuelles, et chaque détail y est conçu pour maximiser le confort, comme l’absence d’angles saillants sur les surfaces en contact avec la peau dans les zones de détente. Avec neuf saunas différents et deux types de bains froids, accessibles aux hommes et aux femmes de manière alternée pour une expérience complète, l’établissement offre une prestation haut de gamme. Une pause bienvenue de bien-être moderne, en plein cœur de Shibuya.

Avec un système audio développé en collaboration avec WHITELIGHT, le SOUND SAUNA offre une expérience sonore extraordinaire.

Solo Sauna Tune (quartier de Kagurazaka)

Le charme du sauna individuel réside dans la liberté presque totale que l’on peut expérimenter dans un espace rien que pour soi.

Le pionnier des saunas individuels urbains

Solo Sauna Tune, le premier sauna individuel au Japon, a été créé pour permettre à chacun de profiter de l’expérience sauna à sa manière.

Lors de la phase d’élaboration, chaque détail a été minutieusement pensé et chaque espace optimisé grâce à la réalité virtuelle, de la qualité des serviettes conçues pour s’allonger dans le sauna à la bande sonore, enregistrée spécialement par le propriétaire à Yakushima. Ce lieu offre un véritable sanctuaire privé pour la relaxation.

Situé dans la zone appelée « Ura-Kagurazaka » (partie cachée de Kagurazaka).

Sway (quartier de Gaienmae)

Un espace adapté à divers usages, allant des salles individuelles aux salles pour groupes.

Un espace de lâcher-prise en harmonie avec la nature

Sway, le premier sauna privé du quartier de Gaienmae, est un espace dont chaque détail évoque la nature. La poignée de la porte d’entrée a été façonnée en plaqueminier, une essence noble, tout comme le comptoir, sculpté en orme du Japon (keyaki).

La signalétique a aussi été conçue en argile, donnant un caractère brut à l’environnement. Cette ambiance, alliant terre, bois et pierre, invite à une expérience sensorielle et à se reconnecter avec la nature, loin de l’agitation urbaine.

Une entrée spacieuse donnant sur la rue.

BAR SAUNA (quartier de Daikanyama)

Un espace de bar où l'éclairage tamisé et les courbes des murs créent une sensation d'enveloppement.

Un établissement sophistiqué sur adhésion, dédié à la détente et la conversation

Après avoir profité d’un sauna et d’un bain froid, au calme dans une salle individuelle, les visiteurs sont invités à se détendre pieds nus sur une moquette douce, dans un bar lounge à l’ambiance tamisée où trône une cheminée.

Rien de tel qu’un espace confidentiel pour converser tranquillement avec ses proches après une séance de relaxation. BAR SAUNA propose une version plus exclusive du sauna tokyoïte.

Dans une salle privée, il est possible de pratiquer le “löyly” (fait verser de l'eau sur les pierres chaudes du sauna) à sa guise.

Sauna Tokyo (quartier d'Akasaka)

Un sauna en bois de Kelo.

Un établissement novateur, héritier de la culture des bains d’Edo

Par-delà l’entrée, semblable à celle d’un ryokan, se dévoile un vestiaire au sol en tatami. Sauna Tokyo puise dans l’essence de la culture traditionnelle japonaise. S’y trouve le plus grand sauna de Tokyo, pouvant accueillir jusqu’à 40 personnes.

Parmi les quatre autres bains de vapeur, un sauna a été réalisé en bois de Kelo, « essence bijou » très prisée en Finlande. Deux autres salles offrent une expérience plus nostalgique avec un sauna de style Showa (1926-1989) au poêle à infrarouge et un sauna inspiré de l’époque Edo avec son bain de vapeur todanaburo chauffé par le sol. Un lieu qui permet d’expérimenter l’évolution des bains de vapeur au travers du temps.

Une entrée empreinte de l'atmosphère d'Edo. Le design du logo a été réalisé par Design AM.