Des joyaux tout récents, des photos originales pour notre revue, sur cinq thèmes
Le cœur serré, Araki #06
Parmi les œuvres créées par Araki au fil des jours, en voici cinq, spécialement prises pour notre revue. Elles représentent l’Araki d’aujourd’hui.
Étranges paradis
« Les “paradis”, je les photographie les samedis et les dimanches. » Araki s’enferme chez lui lors de la séance photos de la série Paradis. De mémoire récente, on a les Paradis en noir et blanc, publiés cette année, mais pour notre revue la série a connu une nouvelle évolution avec les Étranges paradis. Des monstres, des figurines sado-maso, un lion vert, la figurine du démon de la photo Araki… Ce masque regardant au loin coexiste avec les fleurs et les plantes de couleurs vives. Ces fleurs dans la force de leur épanouissement tendent vers une limite, elles vont se faner. La poupée, figurine inorganique, exsude un sentiment de néant. C’est une “odeur de mort” inquiétante qui flotte dans ces étranges paradis. Ces paradis d’Araki dans lesquels « la déesse de la vie est présente, tant que c’est en couleurs » oscillent dangereusement sur une frontière étroite entre la vie et de la mort.
Cimetières de l'œil droit
Les œuvres de Niki de Saint Phalle, cette artiste qui a produit les « tirs », ces tableaux faits de récipients contenant des couleurs sur lesquels elle tire au fusil (une rétrospective a eu lieu fin 2015 à Tokyo). Avec l’idée de lui rendre hommage, Araki, grand fan des œuvres de Niki, a brisé l’objectif de son appareil en lui portant des coups. Les photos ainsi obtenues reflètent le monde qu’il voit de son œil droit, son œil qui a perdu ses capacités de vision. « C’est bien comme ça que je vois. C’est étrange, non ? » La photo est datée du « 15.8.15 » : c’est le 70e anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Araki pour qui les buildings de Tokyo sont comme une « nécropole » laisse entrevoir par cette photo deux cimetières saisit avec son œil droit. Le photographe voudrait-il tirer à lui le hasard pour se dévoiler grandeur nature, avec son champ de vision limité ? Ces Cimetières de l’œil droit se situent à la croisée du hasard et de la nécessité.
Autumn for Art
L’affection que voue Araki à son polaroïd dure depuis de longues années. Pour lui, cet appareil « donne une sensation de photographie quoique l’on prenne pour sujet. Même si la photo n’a pas pris, on a ce ressenti de matière photographique. » Cette série est faite de clichés polaroïd qui n’ont pas été exposés au public. Araki y appose des couleurs acryliques. Ces clichés perdus revivent ainsi pour servir de petite toile à ces tableaux. « Comme je ne sais pas moi-même comment vont réagir les couleurs,», elles s’imprègnent, elles coulent, et le hasard se mêle à la volonté. Ces réalisations utilisent tous les fonds de couleurs des polaroïds et l’on retrouve au milieu des traditionnels papiers blancs des versions en noirs, rouges, bleus, verts, etc. laissant à Araki la liberté et une plus grande ouverture dans ses créations à base de films polaroïd. Avec un sourire réjoui, il lance « Ça, ça marche formidablement en Europe aujourd’hui ! Ha ha ha ha ! »
L'été de la luxure
Ikuko Neesan
Ikuko Neesan a consacré plus de cinquante années de sa vie au métier de Geisha à Akasaka. Dans ce quartier, tout le monde connaît cette personnalité qui est née la même année qu’Araki. Elle jouit aussi de la confiance du monde des politiques et de la finance et elle continue encore aujourd’hui son activité de geisha. Ikuko san dansante, souriante, avec cette allure élégante laisse Araki en émoi, posté, son appareil prêt à se déclencher. Comme dans un dialogue, ils réduisent peu à peu la distance qui les sépare. Un dragon ou un godzilla apparaît, personnifiant le photographe. « En fait, je veux me mettre en scène ! » plaisante-t-il. Le photographe cohabite avec son sujet et partage avec lui cet «instant». C’est ainsi que se sont accumulés d’innombrables liens avec ces différents modèles croisés pour ces occasions. « Rappelle-toi un homme que tu as aimé autrefois ! Tourne-toi un peu vers la gauche.» À l’instant où naît cette relation particulière entre le photographe et son modèle, résonne alors dans le studio le bruit de l’obturateur du Pentax 67 II.
Le cœur serré, Araki —
#01: Sur les traces des 75 années d’un génie de la photographie >
#02: Libéré du cadre de l’époque, Araki va plus loin >
#03: Ces albums de l’époque de Dentsu, point de départ de l’œuvre d’Araki >
#04: Araki nous explique lui-même ses chefs-d’œuvre qui ont marqué l’histoire >
#05: Un mode de photographie multiforme, passant librement d’un appareil à l’autre >
#06: Des joyaux tout récents, des photos originales pour notre revue, sur cinq thèmes
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