Le shunga, théâtre d’un art gay et érotique

Le ”nanshoku”, populaire à l'époque d'Edo, renvoie à un courant particulier du shunga représentant des scènes érotiques homosexuelles.

26.08.2020

Nishikawa Sukenobu

Courant important au sein du shunga, le nanshoku se traduit par “couleurs masculines”, et se réfère à des scènes érotiques gay. Ces images sont dérivées d’anciens mythes, de l’armée, de la religion, du théâtre, de l’enseignement et de la prostitution, et mettent en scène des samurai ou des moines bouddhistes qui se livrent à des relations homosexuelles avec des hommes souvent habillés en geisha.

Le shunga, ou l’art érotique japonais, était particulièrement répandu pendant la période Edo, de 1603 à 1868. Imprimés sur des blocs de bois et produits dans une large gamme de couleurs et genres, les rouleaux étaient intimes, érotiques, et parfois humoristiques. Leur esthétique a notamment été influencée par les illustrations des manuels de médecine chinoise, mais également par le travail de Zhou Fang, artiste chinois actif pendant la période de la dynastie Tang qui a peint des organes génitaux aux proportions surdimensionnées — devenus par la suite une caractéristique du travail de nombreux artistes shunga.

 

Rôles et rituels

Le jugement moral de ces scènes est complexe lorsqu’elles sont considérées à travers les standards contemporains. Ces images présentent souvent une sexualité dérivée de pratiques courantes au sein des monastères, où des prêtres et des moines avaient des relations sexuelles avec des partenaires plus jeunes, souvent prépubères. Ces coutumes religieuses ont été reproduites dans les cercles des samurai, car les jeunes samurai étaient envoyés dans des monastères bouddhistes pendant leur formation. Nombre d’entre eux avaient des relations avec des moines plus âgés, et du même genre. 

Cette sexualité structurée par l’âge est connue sous le nom de shudo, qui signifie “la voie des jeunes hommes”. La prévalence de l’homosexualité masculine a souvent été attribuée au déséquilibre entre les sexes au sein de la population à l’époque d’Edo, le ratio était alors d’environ 70% d’hommes. Dans certaines scènes, l’un des partenaires est parfois habillé en femme en clin d’oeil à l’onnagata, les rôles de femmes tenus par des hommes dans le théâtre kabuki.

Yanagawa Shigenobu I Nanshoku

Unidentified Artist

Miyagawa Chosun Nanshoku 1

Suzuki Harunobi, F.M. Bertholet Collection